LETTRE OUVERTE AUX INCREDULES
LETTRE OUVERTE AUX INCREDULES
par Claude Müller
Introduction
Nul n’est prophète en son pays, ni dans sa
famille, ni pour ses amis…
Cependant, ce travail constitue surtout une
tentative de faire comprendre précisément à ma famille et à mes amis mon positionnement
et mon comportement dans la vie.
En outre, de la même manière qu’on couche des
chiffres sur un papier pour faciliter une opération mathématique, j’écris ces
aperçus, en quelque sorte, pour faire le point, pour essayer de mettre un peu
d’ordre dans mes idées.
Par égard pour un texte qui est le fruit de 45 ans
de lectures et de réflexion, je vous demande d’avoir un peu de patience pour le
lire lentement, sans intervenir mentalement en pensant “mais ce n’est pas comme
ça!” avant de l’avoir lu en entier. Alors, naturellement, vous devrez
réfléchir, soupeser la validité de cette exposition et me soumettre ensuite vos
doutes, vos objections et ce qui n’est pas clair pour vous. Et si vos
objections peuvent changer quelques-unes de mes idées ou modifier ma position,
je devrai m’estimer chanceux, parce que si une personne peut contester les
idées de quelqu’un et lui prouver qu’il est dans l’erreur, cette personne ne
devrait pas se sentir frustrée, mais au contraire se réjouir de se trouver
maintenant plus proche de la vérité (ou si on préfère, moins éloignée de
l’erreur) qu’avant.
De la même manière que je ne construis pas la
moindre des cellules qui composent mon corps, ni ne fais la digestion de “mon”
estomac, ni pousser – ou ne pas pousser – mes cheveux, je ne fais pas davantage
une seule de mes idées. Cependant, tout comme je ne peux pas me bronzer
moi-même mais peux aller au soleil pour que ma peau brunisse, je peux orienter
mon mental de telle manière qu’il ait plus de chances de penser à une chose plutôt
qu’à une autre. Je ne peux néanmoins jamais savoir ce qui va “me passer par la
tête”. En effet, si j’observe attentivement mes pensées, je dois constater que
ce ne sont pas réellement les miennes, parce que je ne les produis pas
intentionnellement. Il importe peu, par conséquent, que les idées que j’ai en
tête proviennent de mes lectures ou qu’elles me soient “venues à l’esprit”.
Sur ce point, il faudrait nuancer et dire que,
d’un côté, ces pensées ne sont pas les miennes (dans le sens que je ne les ai
pas créées moi-même) mais que d’un autre côté, maintenant ce sont bien les
miennes, parce que je les ai assimilées.
Il conviendrait d’ajouter que ce qui devrait
importer véritablement à un lecteur, ce n’est pas d’où proviennent les idées,
mais si elles lui “disent quelque chose”, si elles “sonnent juste”, si elles
peuvent lui être utiles dans sa vie.
Détermination de ce qui est important dans la vie
Commençons donc avec quelques questions:
¿Qu’est-ce qui est le plus important dans la vie?
-
Il me semble que le plus important dans la vie est de savoir ce qui est le
plus important dans la vie, c’est-à-dire que le sens de la vie humaine est de
trouver le sens de la vie. Dans les deux sens du terme : en premier lieu,
dans le sens de signification et en deuxième lieu dans celui de direction,
c’est-à-dire de savoir dans quelle direction orienter notre vie.
¿Normalement, comment peut-on savoir quelque
chose?
-
On peut savoir en apprenant.
¿Et comment est-ce qu’on apprend?
-
Pour apprendre, il faut s’informer et faire des recherches sur le sujet que
l’on veut étudier.
¿Mais comment et où s’informer?
-
En lisant et en écoutant ce que d’autres ont découvert en expérimentant sur
la question tout au long de l’histoire.
¿Où donc peut-on trouver cette information ?
-
Dans les anciennes Écritures des différents peuples, mais aussi dans les
livres, conférences et vidéos de ceux qui, à l’époque actuelle, ont fait
l’expérience de ce que l’on recherche.
Doutes sur les enseignements
¿Très bien, mais comment savoir si cette
information est valable, vraie, et non pas tergiversée ou même inventée?
Généralement, on pense qu’il faut avoir la foi et
croire sans raisonner et sans remettre en question ce qui est affirmé.
Pourtant, plus d’une religion soulignent la nécessité d’analyser les
enseignements et de ne rien accepter béatement. Cette attitude est
particulièrement claire dans le bouddhisme.
Nous verrons plus loin que, finalement, la seule
foi qui nous est demandée est celle de « Cherchez et vous trouverez ».
Notons par ailleurs que le fait de s’interroger
sur le sens de la vie est déjà un indice de ce qu’on cherche, comme l’indique
la phrase que Pascal aurait reprise de Saint Augustin :
« Console-toi,
tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais trouvé ».
On dit
souvent qu’on ne peut pas s’en remettre aux Écritures parce qu’elles ont été
écrites il y a longtemps et qu’elles ne sont donc pas fiables.
- Il est vrai que des erreurs, des déformations,
des déviations et même quelquefois des contresens ont pu surgir. Il peut même
sembler que les religions se contredisent sur certains points. Cependant le
sens général, l’essence de leur message est parvenu jusqu’à nous. Ces
contradictions apparentes sont dues à une approche trop superficielle, ainsi
qu’à un manque de connaissances, de réflexion, d’analyse et d’expérimentation.
Si on veut bien se donner la peine, et le temps, de les étudier d’une manière
un peu profonde, on se rendra compte que toutes disent à peu près la même
chose.
Les Écritures sont le fruit d’une révélation,
c’est-à-dire de la perception de la Réalité que nous serions bien incapables de
percevoir par nous-mêmes. S’il existe l’inconscient, pourquoi est-ce qu’il ne
pourrait pas exister chez des êtres d’exception une superconscience ?
Entre les animaux, il y a différents niveaux de conscience : celle d’une
amibe n’est pas celle d’un grand singe. Pourquoi alors le niveau de conscience
d’un être humain déterminé ne pourrait-il pas être supérieur à celui de la
grande majorité ? Dans les arts et les sciences, quelques génies ont
découvert ce que le commun des mortels serait bien incapable de découvrir par
soi-même. Pouvons-nous nous comparer à
Newton, Einstein, Beethoven, Bach, Miguel Ange, Vélasquez, etc.? Si nous profitons des découvertes et des
inventions de ces êtres exceptionnels dans le domaine de la science, de la
musique, de la peinture, etc., pourquoi ne pourrions-nous pas tirer profit des
enseignements des génies spirituels ? Est-il intelligent de mettre en
doute les révélations d’êtres qui sont encore bien supérieurs aux savants et
artistes universels et dont les découvertes se sont vues confirmées au cours
des siècles par les sages et les
saints ? (Bien que la liste officielle de ces derniers ne soit
probablement pas exhaustive et que, par contre, tous ceux qui y figurent ne le
mériteraient peut-être pas).
Le fait que les enseignements originaux aient été
souvent tergiversés ne doit pas être une raison pour jeter le bébé avec l’eau
du bain, en rejetant tout en bloc sans essayer de comprendre ce qui est dit,
d’y réfléchir, de méditer sur l’essence de ces Enseignements et de tenter de
les mettre en pratique dans la mesure de nos possibilités. D’autre part, il
faut bien voir que si tout le monde connaît les grandes figures religieuses
fondamentales de l’humanité, beaucoup ignorent toutefois que nombreuses sont
les personnes qui, au cours de l’histoire, ont expérimenté la même chose. Si
quelqu’un ne les connaît pas, c’est son problème, et dans la recherche de la
vérité, l’ignorance ne saurait avoir le dernier mot. Par conséquent, pour
savoir si ce que disent les différentes traditions spirituelles est correct et
vrai, et sans jamais admettre une chose pour le simple fait qu’on nous l’ait
dite, il faudra investiguer en cherchant des informations fiables, en les
analysant par la réflexion et, dans la mesure du possible, en les vérifiant par
l’expérience personnelle.
Concordance entre les religions
Plus on considère profondément les enseignements
spirituels et plus leur unité et leur concordance nous apparaissent. Ceci peut
être illustré par un schéma: dessinons un cercle et distribuons quelques points
sur sa circonférence. Ces points représenteront les fidèles de différentes
croyances. Maintenant, traçons les rayons qui partent de ces points pour aboutir
au centre du cercle. Ensuite, inscrivons d’autres cercles concentriques à
l’intérieur du cercle initial. A mesure que les personnes approfondissent leur
expérience spirituelle, elles se rapprochent du centre et se retrouvent donc
sur les cercles plus intérieurs. Nous constatons que la distance entre les
personnes de différents credo diminue à mesure qu’elles progressent vers le
centre. Quand elles atteignent le centre, il n’existe plus aucune différence
entre elles. Remarquons que nous pouvons reprendre cette illustration et élever
ce cercle de deux dimensions à une figure de trois dimensions; nous obtenons
ainsi un cône, symbole d’une montagne qu’il faut gravir. Nous comprenons alors
que ceux qui sont arrivés au sommet jouissent d’une perspective générale et
peuvent guider tout ceux qui sont en train de monter, quelle que soit la voie
que ceux-ci suivent.
De la même manière qu’on s’exprime en français, en
espagnol ou en chinois selon les lieux et les circonstances, on peut exprimer
les mêmes vérités, entre autre, en « bouddhiste », en « chrétien »
ou en « musulman ». Et de la même manière qu’il est possible
de trouver le centre d’un cercle en connaissant trois points sur sa
circonférence, le fait d’étudier différentes manières d’exprimer les mêmes
enseignements peut nous aider à trouver où est leur centre, c’est-à-dire leur
noyau ou leur cœur, et de nous en approcher.
Nous reviendrons sur ce point mais, pour le
moment, continuons avec quelques questions peut-être un peu moins pédantes,
mais tout aussi pertinentes (à moins qu’elles ne soient au contraire quelque
peu impertinentes…) :
- Si nous savons qu’il y a 5,7 milliards de
personnes dans le monde et si nous pensons au nombre de personnes qui sont
passées par notre planète dans le cours de l’humanité, pourquoi nous
comportons-nous comme si nous étions le centre du monde (même si ce centre, par notre tendance à
l’identification et aux projections peut embrasser notre famille et nous donner
ainsi l’illusion d’être altruiste).
- Pourquoi le résultat obtenu par notre équipe de
football favori, ou pour le moins la maladie de notre enfant, nous importe-t-il
plus que l’annonce de milliers de morts dans une catastrophe?
Peut-être parce que tout est si incertain et sujet
à caution. En réalité, de quoi peut-on être absolument sûrs dans la vie ?
La question de la mort
- Nous pouvons être absolument certains que nous
allons mourir. Alors pourquoi ne pas profiter de cette certitude ?
Pourquoi, étant complètement sûrs que nous allons mourir, nous comportons-nous
comme si nous étions éternels ? En voyant s’approcher un danger, est-il
raisonnable de fermer les yeux et de ne pas essayer de faire quelque chose?
Cette attitude serait à…mourir de rire si ce sujet n’était pas aussi
préoccupant et si tabou dans notre société.
Face à l’angoisse de la mort, les êtres humains
réagissent en suivant des lignes de conduite différentes, mais qui peuvent se
regrouper en trois attitudes principales:
·
L’oublier, ou plutôt essayer de l’oublier. En appliquant le proverbe: “Loin
des yeux, loin du coeur”, nous suivons la politique de l’autruche. Nous ne
mettons pas la tête dans le sable mais dans le téléviseur et tous types
d’écrans. Nous errons d’écran en écran: celui de l’ordinateur du lieu de
travail, celui du smart phone, du GPS (en voiture et même à la montagne).
Remarquons que ces écrans font écran à la perception du monde qui nous entoure.
·
Nous essayons d’oublier le problème de la mort au travers de toutes sortes
de distractions, de divertissements, (dans le sens où Pascal employait ce mot):
la télévision, le football, les films, les sports, les vacances, les voyages,
ou bien aller au restaurant ou dans un établissement public pour (essayer de)
partager ma vision du monde. Nous pouvons constater que cette
attitude est très répandue dans la société actuelle, dans laquelle on va
toujours plus vite à nulle part.
·
Se réfugier dans une croyance qui nous assurera notre futur dans un Au-delà
où nous survivrons en tant que ce petit personnage actuel qui s’identifie à son
nom, à sa famille, à son pays, à sa profession, à son sexe, à sa langue, à son
statut social, etc.
·
Nous observerons par ailleurs que, souvent, ces deux types d’échappatoire
mentionnés se conjuguent: on se laisse distraire par le monde (et par tout le
monde), mais on conserve un vague sentiment de religiosité que l’on sort de
temps en temps comme une roue de secours quand notre train de vie s’est abîmé
en passant dans un creux sur le chemin de la vie.
D’une certaine manière, on joue double-jeu et on
conserve des enseignements religieux seulement ce qui nous convient. On croit,
mais sans aucun engagement. On croit tous les jours … de Noël, un petit peu
durant toute sa vie et beaucoup juste avant sa mort.
Ce qui nous manque, habituellement, c’est
l’enthousiasme, dont l’étymologie nous suscite qu’il s’agit d’une possession
divine, du dieu qui entre en l’homme pour l’inspirer, qui « rapte »
le petit moi : qui l’enlève, et l’élève, pour le faire sortir de lui-même,
ou plutôt de l’idée qu’il se fait de lui-même. Cette sortie est
apparentée à l’ex-stase (être dehors).
Pour illustrer le manque d’enthousiasme des
« fidèles », voici la traduction d’un prospectus trouvé à l’entrée
d’une église en Espagne:
« Comme c’est
étrange ! »
N’est-ce pas un peu étrange
qu’un billet de 20 € nous semble si grand quand nous le donnons à l’église mais
si petit quand on l’emporte au magasin?
N’est-ce pas un peu étrange
qu’il nous soit si difficile d’apprendre une simple vérité de l’Évangile pour
la partager avec les autres, mais si facile pour nous de répandre des
médisances?
N’est-ce pas un peu
étrange que nous croyions si facilement ce que disent les journaux, mais
que nous remettions en question ce que la Bible dit?
N’est-ce pas un peu étrange que
tous désirent aller au Ciel, mais seulement dans la mesure où ils ne se voient
pas obligés de croire, penser, dire ou faire quelque chose qui suppose un
certain sacrifice?
Comme c’est étrange, ne pensez-vous pas? »
Différents types de
croyants
En effet, nombreux sont ceux qui s’autoproclament
“croyants” mais qui, en fait, ne font pratiquement rien d’autre que de croire
qu’ils croient. Ceux qui disent : « Je suis croyant mais non
pratiquant », démontrent qu’en réalité ils ne croient pas, parce que celui
qui est convaincu qu’il va pleuvoir emporte normalement son parapluie…Citons
San Gregorio Magno : « Seul croit vraiment celui qui pratique
ce qu’il croit. »
D’autre part, le fait qu’une personne dise :
« je crois » dénonce un certain doute, car cela signifie qu’elle
n’est pas sûre de sa croyance. Donc, nous pourrions dire : il ne faut pas
croire, il faut être sûr, il faut savoir. Il ne faut pas parler (ou écrire…),
il faut agir!
Tandis qu’une religion devrait nous rapprocher de
la Vérité, nous aider à nous éveiller à la Réalité, trop souvent,
malheureusement, c’est tout le contraire qui se produit: elle nous aide à
dormir bien tranquilles, en nous reposant confortablement sur nos croyances.
Qui va tous les dimanches à l’église en répétant
toujours « je crois », « je crois », « je
crois », peut-être pour essayer de s’auto convaincre, ressemble souvent
plus à un corbeau qu’à autre chose…
Toutefois, pour nuancer ces propos, il faut bien dire aussi que
l’homme étant ce qu’il est, c’est-à-dire un animal d’habitudes, il est
nécessaire qu’on nous répète la messe aux ânes. En outre, dans l’impossibilité
où nous nous trouvons de nous représenter la Divinité, nous avons besoin de
représentations mentales suscitées par des supports physiques, matériels, en
forme d’images, de statues, de vitraux, etc. comme symboles et évocations des
vérités immatérielles.
D’autres croyants, peut-être un peu plus
conséquents avec eux-mêmes, mais radicaux jusqu’à la racine, font preuve d’une
intolérance qui montre leur absence d’ouverture envers les autres. Or,
qu’est-ce qu’une religion si ce n’est, comme l’indique l’étymologie du mot, (religare :
re-lier, = ré-unir) une
aspiration à l’union avec Dieu et sa manifestation, c’est-à-dire avec tout ce
qui existe. (Observons que l’un des sens du mot yoga signifie également jonction,
unification, union).
En revanche, une personne qui a une foi déjà plus
profonde, et si elle est conséquente avec ses croyances, aura des obligations
et des engagements qu’elle doit s’efforcer de respecter. Mais il résulte plus
agréable de continuer à dormir dans un confort insouciant et une paresse
ignorante. Ceci explique pourquoi souvent, ou bien on ne fait pas attention aux
prophètes, (nul n’est prophète dans son pays) ou bien on les tue parce qu’ils
dérangent notre “bonne” conscience (qui en fait n’est pas si bonne…). À notre
époque, on ne tue plus les prophètes. En effet, de la même manière qu’on noie
le poisson en combattant les idées écologiques avec une profusion
d’informations contradictoires, - provenant
toutes d’excellents experts naturellement! -, on dilue les messages spirituels
dans une foule d’informations tergiversées, venant quelquefois de personnes de
bonne foi, si on peut dire!
Parfois, la Conscience Universelle réussit à
prendre pleine conscience d’elle-même et reconnaît tous les organismes de
l’Univers comme étant sa propre
expression (ou ne se reconnaît dans aucun en particulier, ce qui revient au
même car il ne s’agit alors que de l’autre côté de la même médaille). C’est
ainsi qu’elle s’exprime au travers de certains organismes psychosomatiques
comme par exemple, pour ne citer que les plus connus, Bouddha, Jésus ou
Mahomet.
Ces êtres éveillés essaient de transmettre leur
découverte à tous et ainsi naissent les religions, dont le rôle consiste à unir
“notre” conscience apparemment personnelle avec la Conscience-en-soi: l’enfant
prodige doit revenir dans sa famille, le Fils doit rejoindre son Père au
travers du Saint-Esprit.
Par conséquent, la raison d’être des religions est
d’essayer de nous réveiller du sommeil existentiel. Mais nous sommes tellement
endormis que nous ne croyons pas en elles, ou tout au moins, nous sommes
sceptiques. Nous nous identifions à notre corps et avec cette perspective, la
joie et la douleur alterneront inévitablement. Parce que si nous sommes nés,
nous mourrons et nous aurons peur de la mort. Cela même qui cause notre joie
sera la source de notre tristesse (comme par exemple les résultats de notre
chère équipe de football…).
L’indifférence vis-à-vis du spirituel dans le monde moderne
Pourquoi ne faisons-nous pas attention à ce que
disent les Éveillés?
Dans la société occidentale moderne, aussi bien
les incrédules que les personnes qui disent qu’elles croient, sont immergées
dans une ambiance antireligieuse (ou pour le moins a-religieuse). Les
« miracles » réalisés aujourd’hui par la science et la technologie
détournent notre attention des problèmes fondamentaux. Nous ne pouvons nier
que, dans le domaine technologique, l’humanité ait avancé d’une manière spectaculaire,
mais ce progrès technologique ne signifie nullement un progrès parallèle dans
la connaissance de soi.
Notons que beaucoup de découvertes se doivent à de
nouveaux appareils qui ne sont que des prolongements des sens. Or si la
recherche spirituelle consiste en grande partie à faire abstraction des sens, par la réflexion
ou la méditation par exemple, de quelle utilité ces instruments peuvent-ils
être pour notre quête ? Ils sont à même de nous fournir de nombreuses
données mais encore faut-il savoir les interpréter. Les ordinateurs peuvent
nous aider mais, pour le moment du moins, ils ne nous donnent que ce qu’on y
met. Il n’y a pas encore de logicielles pour la métaphysique…
Personnellement, je pense que si on a progressé de
cette façon dans le monde matériel et « extérieur » à nous, cela est
dû au fait que les connaissances techniques et scientifiques se transmettent
facilement. Il suffit de répéter et d’améliorer ce qui a été découvert ou
inventé par quelques génies ou même quelquefois par hasard. Mais comment
vivrions-nous si nous avions dû découvrir par nous-mêmes toutes les
applications de la technologie actuelle ? Combien d’appareils et
d’instruments aurions-nous à la maison? En revanche, dans le domaine
“intérieur”, c’est-à-dire en nous-mêmes, il est beaucoup plus difficile
d’arriver à la connaissance, même si on nous l’enseigne. Par exemple, on peut
acheter un ordinateur et quelqu’un peut nous enseigner à l’utiliser. Mais de la
même manière que personne ne peut manger pour nous, nul ne peut nous
transmettre la connaissance avec une injection ; ni apprendre et réfléchir
pour nous. Selon une image bien connue, on peut nous montrer la lune mais on ne
doit pas confondre le doigt pointé vers elle avec l’astre lui-même. Il nous
faut faire un saut mental, ce qui requiert effort et application. On doit donc également situer les choses dans
leur contexte et leur perspective. Pour l’illustrer, imaginons un groupe de
personnes formant un cercle assis autour d’une table. Si on leur demande de
montrer du doigt où est la lampe qui se trouve juste au centre du cercle,
chaque doigt sera orienté dans une direction différente. Si on compare la
direction indiquée de manière intrinsèque, sans tenir compte du contexte, il
semblera que les opinions quant à l’emplacement de la lampe divergent. Les
personnes se trouvant l’une en face de l’autre sembleront même signaler des
positions radicalement différentes. Pourtant, c’est précisément parce que
l’orientation des doigts varie qu’elle est juste pour tous les assistants. Il
faut donc tenir compte non seulement de la direction signalée par le doigt mais
encore de l’emplacement du propriétaire du doigt. C’est toute la question du point
de vue. (Remarquons au passage que peu importe que le doigt soit propre
ou sale…).
Dès lors, si on recherche honnêtement la vérité,
on peut se demander s’il est bien judicieux de douter des affirmations de
Bouddha ou du Christ, ainsi que des découvertes effectuées par des personnes
qui ont consacré toute leur vie, jour et nuit, à la recherche spirituelle
(c’est-à-dire à la quête de la Vérité) et, se soumettant à de rudes austérités
et une sévère discipline, ont appliqué et vérifié les techniques particulières
qui leur furent transmises. Ce refus ne signifie-t-il
pas présumer de savoir plus qu’eux, et ceci en outre sans s’être suffisamment
informé et sans avoir longuement réfléchi sur ces questions?
Il a été dit également que celui qui croit tout le
monde est un idiot, mais que celui qui ne croit
personne est un fou.
Celui qui doute des enseignements des Maîtres, est
comme un aveugle qui nierait l’existence des couleurs.
En outre, qu’une manière de voir les choses soit
partagée par une majorité ne constitue nullement une preuve de son bien-fondé.
En effet, par exemple, dans une société composée uniquement de daltoniens, on
se moquerait de celui qui n’est pas affligé de cette anomalie.
Allez à contre courant du milieu qui nous entraîne
résulte moins commode que de se laisser mener et de se laisser vivre. Dans la
civilisation provisoirement moderne actuelle, tout nous distrait et dévie notre
attention des questions fondamentales. Plongés dans l’ignorance, nos
dirigeants, aveugles conduisant des aveugles, tendent à perpétuer le système.
Les médias diffusent le message « on ne vit qu’une fois » et la
publicité, pour flatter et justifier notre avidité, nous susurre :
« fais-toi plaisir », « pense un peu à toi », « tu
mérites notre produit », etc.
Cependant, si on réfléchit un peu profondément,
« bien vivre », « mener la belle vie » est en réalité une
erreur et signifie en fait vivre faux et donc vivre mal. Car s’attacher aux
plaisirs du monde, c’est vendre son droit d’aînesse (la filiation de la
Conscience dans l’homme) pour un plat de lentilles.
Lorsqu’on est jeune, sans problèmes de santé, tout
va relativement bien. Mais quand surgit une difficulté majeure, lorsque les
maladies arrivent, quand la vieillesse nous envahit et que la mort nous guette,
quand le bal de la vie nous surprend à contre-pied et qu’on a déjà l’un d’entre
eux dans la tombe, c’est le moment où on se souvient de Dieu.
Alors quand, à cause d’une maladie ou d’un
accident, nous serons prostrés de douleur dans un lit d’hôpital ou déjà dans
notre lit de mort, ce serait terrible si, en ce moment-là, nous sentions que
nous avons raté notre vie en la dilapidant en des choses superficielles et
éphémères.
D’un autre côté, les moments de grandes douleurs
et de crise sont des occasions, des opportunités où une porte peut s’ouvrir sur
le derrière des choses et de leurs apparences.
En effet, si nous consultons l’étymologie du mot
crise, nous constatons que ce mot issu du grec “Κρίσις”, associe le sens de “jugement
et celui de “décider, séparer, distinguer, discerner, trancher,
faire un choix”. Nous voyons par là que ce peut être une occasion pour rectifier notre
jugement et pour décider de nous orienter dans une nouvelle direction.
Car il serait triste d’arriver à la fin de notre
vie sans en avoir trouvé la finalité et de nous rendre compte que nous nous
sommes trompés (dans les deux sens du terme: celui d’avoir fait une erreur et
celui de s’être dupé soi-même).
Mais au contraire, ne serait-ce pas terrible si on
se rendait compte qu’on a perdu tous les plaisirs de cette vie!
- En admettant pour un instant qu’il n’existe rien
après la mort, alors qu’est-ce qui peut nous importer? Rien n’importe vraiment
et par conséquent on peut croire une chose ou ne pas y croire, faire une chose
ou son contraire, qu’importe. Par conséquent, croire à quelque chose ne sera ni
mieux ni pire que ne croire à rien. Parce que s’il est vrai que je ne gagnerai
rien en croyant, je n’y perdrai rien non plus. En réalité pourtant, comme on
dit souvent qu’on cultive ses croyances pour se tranquilliser, je serai donc
plus tranquille et un peu plus heureux.
En revanche, s’il existe quelque chose après la
mort, alors notre manière de vivre, de penser et d’agir sera d’une immense
importance. Et entre le peu que je perdrai en croyant (parce que la vie est
terriblement courte) et tout ce que gagnerai si je crois, il sera plus sage de
tabler sur la croyance. En effet, s’il n’y a rien après la mort, je n’aurai aucun
problème, ma paix est assurée. Je ne verrai jamais mon erreur et ne souffrirai
jamais ses conséquences. Par contre, s’il y a quelque chose, j’aurai essayer de
faire (si je m’efforce) ce que je devais.
Je dois souligner que, si je crois, ce n’est pas
pour miser sur ce qui vient d’être dit. Cela est dû aux nombreuses années
d’étude, de réflexion et de quelques expériences éparses qu’il m’a été donné
d’avoir et qui vont dans le même sens que les affirmations des Écritures.
De toute façon, même si Dieu n’existait pas, qu’il
serait grand d’essayer de faire ce qu’Il ferait s’il existait!
D’autre part, il est d’autant plus grand de se
comporter noblement qu’on croit moins en Dieu. Les athées altruistes sont les
plus méritants.
Pour ma part, je peux comprendre les doutes des
incroyants, parce qu’il est évident qu’il est plus facile pour un ex-sceptique
de comprendre un incrédule que pour celui-là de comprendre un croyant.
Le doute sur l’existence de Dieu provient sans
doute de la confusion engendrée par la manière de l’appréhender dans le monde
occidental, où Il est présenté comme un père avec un fils unique. Cette façon
de le définir peut être valable, mais à condition de comprendre qu’il s’agit
seulement d’une manière de parler. Elle a servi, et peut encore servir, pour
bon nombre mais elle en a aussi détourné beaucoup du christianisme,
spécialement dans le monde actuel.
On a l’habitude de dire que les gens croient en
Dieu, à la résurrection, à la réincarnation, ou à quoi que ce soit par
commodité, par la crainte de disparaître à jamais, pour donner un sens à leur
vie, etc. Sans aucun doute, tout cela existe, mais cette explication n’est pas
profonde. Pour y arriver, il n’est nul besoin de beaucoup d’années d’études et
de réflexion. Cette “conclusion”, en plus du fait qu’elle a déjà été exprimée
très souvent, est à la portée de tout esprit qui se ferme et ne pense pas…
Les concepts au sujet de Dieu
Il n’a pas de sottes religions, il n’y a que de
sottes gens… Aucune religion ne détient le monopole de la Vérité, il n’y a pas
de religion plus juste qu’une autre, il y a simplement, à l’intérieur de
chacune d’entre elles, des adeptes qui ont une compréhension et une foi plus,
ou moins, profondes que celles de leurs coreligionnaires. Je dirais, en
plaisantant un peu, que la vraie religion, c’est celle qui ne se distingue pas
des autres…
Nous pourrions presque dire qu’il y a autant de Dieux
que de personnes, c’est-à-dire que chacun à son propre concept de Dieu.
Mon concept de Dieu n’est pas le vôtre, ni le
vôtre n’est le mien. Par conséquent, on ne devrait pas juger quelqu’un sur ses
croyances, parce que nous ne savons pas ce qu’elles sont vraiment, ni la
manière dont une personne croit. Nous jugeons les autres à partir de ce que
nous-mêmes croyons qu’ils croient.
D’un autre côté, d’une certaine façon, un athée
“crée” Dieu, avant de ne pas croire en lui. C’est-à-dire: premièrement il se
construit une idée grossière de Dieu et ensuite il décrète que ¨ça »
n’existe pas. Et il a raison de ne pas croire à cette image infantile qu’il
projette. Il devrait cependant mieux s’informer et réfléchir avant de
s’exprimer sur ce sujet.
Mais alors, finalement, à quoi pouvons-nous
croire? En Dieu? Mais qu’est-ce que c’est que ce Dieu?
- Aucune définition de Dieu ne saurait être
correcte, parce que, étant in-fini, Dieu ne peut être dé-fini. Ni
la Vérité, ni Dieu ne peuvent se laisser enfermer dans un concept, parce que
l’Infini ne peut-être défini, c’est-à-dire limité. Le Tout ne pourrait être
limité que par quelque chose qui serait hors de lui. Mais rien ne peut exister
hors de lui puisque par définition le tout embrasse tout. Par conséquent, la
meilleure définition de Dieu – ou la moins mauvaise si l’on préfère – sera la
moins précise, la moins déterminée. Cette définition, nous la trouvons
dans la Bible: “Yahvé” = “Je suis celui qui est”. Et si Dieu est CE QUI EST,
est-il raisonnable de demander si ce qui est existe ? D’autre part, si Dieu est Tout, n’est-il pas
ridicule de demander où est le Tout ? Quand nous demandons où est Dieu,
nous ressemblons à un poisson nageant dans l’océan qui demanderait de l’eau.
Deux choses découlent de tout ce qui vient d’être
dit: on ne peut ni prétendre avoir un concept correct de Dieu, ni douter de Son
existence (si ce concept s’entend comme nous l’avons vu et que nous
développerons plus loin).
Naturellement, tout ceci ne nous avance guère dans
notre quête de compréhension. Essayons donc de préciser et d’analyser les
concepts précédents: Quand on dit que Dieu est l’Être, on ne doit pas le comprendre
comme étant un être, mais comme L’ÊTRE, le seul et unique Être, dont
nous ne pouvons ni devons nous faire une représentation (c’est un point sur
lequel insiste particulièrement le Judaïsme, l’Islam et le protestantisme).
C’est cet Être qui se manifeste sous une multitude d’aspects (depuis une
particule subatomique jusqu’à l’Univers (ou le Multivers?), en passant par les
minéraux, les plantes et les êtres humains.
L’intelligence
Pour nous rapprocher de la cosmovision de l’Inde,
continuons avec quelques questions-réponses.
¿Qui a fait le hardware d’un ordinateur?
- L’intelligence humaine.
Et qui a fait le software d’un
ordinateur ?
- L’intelligence humaine.
De la même manière, qui a fait le corps humain?
-
L’intelligence divine.
Et qui a fait l’intelligence humaine, si ce n’est
l’Intelligence divine, la seule intelligence qui soit, l’intelligence de
l’unique ÊTRE-CONSCIENCE. En effet, bien qu’il existe de nombreux types
d’intelligence, au fond, il n’existe qu’une seule et unique
intelligence. Nous disons par exemple qu’un animal est intelligent. Mais en
réalité, cet animal ne possède pas cette intelligence. C’est notre
perspective, notre manière de voir les choses qui lui attribue cette
intelligence. En fait, cet animal, comme nous-mêmes et tout ce qui existe,
n’est rien d’autre qu’une expression de l’unique intelligence, qui s’exprime
aussi bien dans un ver de terre que dans un génie. Si l’on disait que ce qui
permet à l’animal d’agir de manière adéquate c’est l’instinct, ce dernier ne
serait également qu’une manifestation de l’Intelligence.
De la même manière que l’eau, sans changer de
nature, se manifeste sous forme de liquide, de glace ou de gaz, c’est la même
intelligence qui, sans jamais changer de nature, s’exprime en mille formes et
degrés de manifestation distincts.
Chez l’homme même, on trouve plusieurs types
d’intelligence ; celle-ci s’exprime de différentes manières : elle
peut être manuelle, émotionnelle, intellectuelle, etc. On pourrait dire
cependant que la plus haute intelligence est celle que personne ne revendique…
Nous pouvons nous demander, parmi de nombreuses
autres questions:
Qu’est-ce
qui me fait respirer? Qu’est-ce qui fait circuler mon sang? Qu’est-ce qui
coordonne mes mouvements? Qu’est-ce qui me fait sentir que je suis ? Qui
sait que je comprends ou ne comprends pas ?
Pour que tout cela soit possible, il faut qu’il y
ait une conscience et une énergie…
Nous pourrions dire que Dieu est précisément cette
Conscience et cette Énergie qui permet à quelqu’un de dire que Dieu n’existe
pas…
Ce qui n’existe pas en réalité, c’est nous-mêmes
en tant qu’entités séparées. Mais ceci n’est pas très agréable à entendre pour
nous qui nous identifions à notre petit “Moi”.
Nier l’intelligence est absurde, parce que cette
négation fait appel à la faculté de discerner entre le juste et le faux. Or
cette faculté de discernement présuppose l’intelligence. Celle-ci n’est du
reste rien de personnel, ce n’est jamais notre intelligence même si, à
cause de notre ignorance, nous nous l’attribuons. C’est l’intelligence de
l’Être unique qui se manifeste en tout, depuis les plantes qui “savent” boire,
se nourrir et chercher la lumière, jusqu’à l’incarnation sur la Terre de ce pur
ÊTRE infini et incognoscible sous la forme d’un Bouddha ou d’un Jésus (« Le
Père et moi sommes un »).
Si on dit, avec les matérialistes, que tout est le
fruit du hasard, alors cette affirmation l’est aussi. Dans ce cas, quelle
valeur peut-elle avoir? Et si l’on disait que le hasard peut être intelligent,
ce ne serait qu’une autre manière de dénommer Dieu. (On dit que Dieu est le
pseudonyme qu’Il prend quand Il ne veut pas signer son œuvre…)
Par ailleurs, si c’est le hasard qui a fait, par
exemple, la nature avec toutes sa beauté, alors : oh ! Divin
Hasard ! Adorons-le ! Adorons ce qui a fait toutes les merveilles du
monde et surtout, la capacité de s’émerveiller !
Quant à l’affirmation “tout n’est que chimie” elle
est, elle aussi, une pensée. Par conséquent, ou bien cette pensée n’a aucune
valeur, ou bien elle est l’expression de l’intelligence immatérielle qui
s’exprime au travers de phénomènes matériels, à la manière des ondes de radio
qui ont besoin d’un appareil pour être entendues, de l’électricité qui
nécessite une lampe ou un autre appareil pour pouvoir se manifester, ou d’un
artiste qui a besoin d’un moyen matériel pour exprimer ses idées.
Quand quelqu’un dit que la vie n’a pas de sens,
cette personne ne se rend pas compte que, en le disant, elle fait
inconsciemment appel à un ordre implicite. De la même manière, un cerveau a
besoin de quelque chose de plus que d’éléments matériels ou, pour le moins, de
particules beaucoup plus subtiles que celles qui le composent. Ces particules
doivent être intelligentes ou être l’instrument d’une intelligence qui les
gouverne.
Dans un de ses textes, Éric Tolone nous dit :
« L’intelligence provient de l’intellect.
L’intellect personnel est une fraction de l’Intellectuel universel qui est
lui-même la réflexion dans le Cosmos de l’Intellect divin transcendant.
La conscience est la simple faculté de percevoir.
Par conséquent, c’est elle qui perçoit aussi les connaissances de
l’intellect.
Quant à la conscience individuelle, c’est une
focalisation de la Conscience en un point de l’espace et du temps ».
Le corps ne fabrique pas d’intelligence.
Le mental non plus mais, avec le corps, il permet son expression. Le mental pur
est comme un miroir, et il est nécessaire parce que l’œil ne peut se voir
lui-même. Le corps et le mental sont donc importants mais en réalité la chose
vue n’est pas dans le miroir et celui-ci n’est pas la chose vue en lui. Ce qui
est fondamental, c’est la faculté de voir, de savoir. Cette faculté, c’est la
Conscience (latin: conscientia, de scire, savoir).
Mais savoir quoi ?
- Savoir que l’on est.
En effet, en général, les
Écritures hindoues ne parlent pas d’intelligence mais de Conscience.
Pour elles, Dieu n’est pas un personnage dans le ciel, sino l’unique ÊTRE, la
seule Conscience et l’unique Béatitude à la fois. Ces trois aspects sont
inséparables, de la même manière que la luminosité, la chaleur et le pouvoir de
combustion, ou l’énergie, ne peuvent être séparés du feu. C’est:
l’Être-Conscience-Béatitude. C’est l’Être conscient d’être. Et ce sentir être,
c’est la Félicité.
Être – Conscience – Béatitude
Détaillons ces trois aspects, qui sont
indéniables:
1.
L’Être
Pourquoi ne peut-on pas nier l’Être?
-
Parce que ce que personne ne peut nier, c’est sa propre existence. (Car
pour pouvoir nier ou affirmer quelque chose, il faut déjà exister).
2.
La Conscience
Si nous demandons à quelqu’un: « Tu
existes ? », il ne pourra répondre que :
« Naturellement ! » Mais si nous lui demandons comment il sait
qu’il existe, il se retrouvera probablement quelque peu embarrassé pour
répondre. Et s’il nous demande alors si nous avons une réponse, nous lui
proposerons la suivante :
-
Nous savons que nous existons grâce à “Cela” intangible qui voit le mental.
Grâce à cette Lumière (remarquons que l’étymologie du mot Dieu est
étroitement liée à la notion de lumière, de même que le mot día, jour
en espagnol. (Pensons d’ailleurs à lundi, mardi, etc.), qui se
reflète dans tous les êtres, qui n’appartient à personne, qui est totalement
impersonnelle et nous permet de voir que nous voyons, savoir que nous savons,
et savoir que nous sommes. En effet, on sait qu’on existe par
« notre » conscience.
Mais la Conscience, qu’est-ce que c’est ?
-
La conscience est ce qui permet de savoir (répétons-le : du latin conscientia,
de scire, savoir) qu’une chose est en train de se passer, d’être au
courant de quelque chose, de nous rendre
compte des phénomènes aussi bien extérieurs qu’intérieurs tels que les
sentiments, les pensées, les sensations, etc. C’est l’être conscient d’être et
d’être conscient.
Et pourquoi ne peut-on pas nier la conscience non
plus?
-
Parce qu’on ne peut pas ne pas la
trouver si on la cherche. Il en est de même que pour l’Être: pour nier - ou
affirmer - la Conscience, il faut être conscient. On peut ne pas être
conscient, mais on ne peut jamais être conscient de ne pas être conscient.
Répétons-le encore une fois: la Conscience ne peut pas ne pas être trouvée si
on la cherche (même si elle ne peut pas être appréhendée de la même manière que
les autres choses car elle n’a pas de forme, étant donné qu’elle est antérieure
au mental qui est ce qui crée les formes et les noms). En effet, de la même
manière que nous ne pouvons pas nier notre existence sans entrer en
contradiction, nous ne pouvons pas davantage nier “notre” conscience, parce
qu’elle entre automatiquement en jeu pour nier ou affirmer. Par exemple, pour
qu’un croyant puisse affirmer que Dieu existe, il faut que lui-même existe et
soit conscient. De la même manière, pour pouvoir dire que Dieu n’existe pas, un
athée doit exister et être conscient.
-
Tout comme une goutte d’eau ne peut se noyer, et que le feu ne peut se
brûler, je ne peux jamais, dans un moment donné, être conscient de ne pas être
conscient. Nous voyons tous des “choses” différentes, mais la faculté de voir
est commune à tous. Y si nous observons bien, nous voyons toujours, même si
nous voyons seulement que nous ne voyons rien.
Mais alors, ce qu’on appelle inconscient, qu’est-ce
que c’est?
- Nous appelons inconscient ce qui, pour nous -
c’est-à-dire pour chacun d’entre nous, pour “moi” - est inconscient. Mais ce que
nous appelons inconscient est en réalité Conscience. Nous ne contrôlons pas le
métabolisme de notre corps: la circulation du sang, les sécrétions des diverses
glandes, la rénovation des cellules, etc. Cependant, pour coordonner toutes ces
fonctions de l’organisme, il faut bien une conscience. La source de la
conscience est la même pour chaque organisme, que ce soit une plante, un
animal, ou un être humain. Sans cette conscience, « moi » (un tel ou
une telle), je ne pourrais ni dire, ni penser, ni sentir “je”. En réalité, il
n’existe que cette Conscience qui, comme nous l’avons vu, est synonyme d’Être
et de Béatitude (Sat-Chit-Ananda), et qui illumine tout.
Cette Conscience est en elle-même atemporelle.
Elle est hors du temps et de l’espace, ou plutôt, ceux-ci sont en elle parce
qu’elle les crée par l’intermédiaire du mental. Il est très important de se
rendre compte que la Conscience, qui est pourtant notre véritable nature, ne
peut se voir elle-même. Étant sans forme, nous ne pouvons la voir comme quelque
chose de défini, comme nous voyons les choses extérieures ou intérieures (les
pensées et les sentiments par exemple). Étant sans particularités, nous ne
pouvons l’appréhender. Qui pourrait saisir ce qui, comme l’espace, est à la
fois à l’intérieur et à l’extérieur de toutes choses et de tous les êtres (et
par conséquent de nous-mêmes aussi) ?
Si on réfléchit, on peut se rendre compte que
quand une personne se regarde dans un miroir, elle voit seulement un corps,
elle ne voit pas ce qui réellement voit ce corps. Le problème, c’est que, comme
nous nous identifions à notre corps, nous suivons le raisonnement inconscient
suivant : « je vois un corps dans le miroir et comme c’est moi qui
suis ce corps, c’est donc moi qui le voit ». Mais est-ce vraiment “mon” corps?
Avons-nous fait notre corps? Et si ce n’est pas le cas, où l’avons-nous acheté?
Dans une grande surface, dans un Grand Magasin, dans un bazar, dans une
boutique? J’ai donné mon accord pour qu’il soit créé? Ou pour changer
continuellement, pour tomber malade et finalement mourir? D’autre part, lequel
est mon corps: celui du bébé, de l’adolescent, de l’adulte ou le corps décadent
du vieillard?
Nous pouvons illustrer le mécanisme de
l’identification au corps de la manière suivante:
Tout comme si la lune, en se voyant éclairée,
croyait qu’elle brille par elle-même tandis qu’en fait c’est le soleil qui
l’éclaire, l’appareil psychosomatique, qui en réalité est illuminé par la
lumière de la conscience, se prend pour ce corps-mental humain. Pour le dire autrement :
la conscience, la source unique de lumière, est projetée au moyen du miroir
constitué par le mental humain sur l’organisme psychosomatique qui se prend
ensuite pour l’auteur de cette lumière alors qu’en réalité il ne fait que
permettre à la lumière de se manifester.
En faisant une petite digression au sujet de la
lumière et de la Conscience, nous pouvons réfléchir et nous rendre compte que
ce qui voit le soleil est supérieur au soleil et que par conséquent la lumière
de la Conscience est supérieure à celle du soleil. En effet, si nous voyons que
le soleil brille, c’est grâce à la lumière de “notre” conscience. De la même
manière que la lumière du soleil éclaire le monde, la lumière de la conscience
illumine aussi bien le monde dans lequel se trouve le soleil, que notre corps
et les pensées du mental (qui croit de manière erronée qu’il est celui qui
voit).
Nous pouvons ajouter également que la lumière de
la conscience est éternelle, tandis que celle du soleil disparaîtra un jour.
Il est à noter encore que si nous n’avions pas de
conscience, rien n’existerait pour nous.
3.
La Béatitude (synonyme de: félicité)
L’Être embrasse tout, inclut tout, aime tout comme
lui-même parce que tout est Lui-même. Et comme l’amour authentique est
intimement lié au bonheur, l’être est aussi Béatitude; l’Être est heureux
d’être conscient d’être.
Comment la Béatitude surgit-elle en l’être humain?
- Le simple fait d’être conscient d’être conscient
est, en soi, béatitude. C’est-à-dire: se sentir exister est béatitude. Nous
sommes heureux quand nous sommes parce qu’être est notre véritable
nature. Mais il ne s’agit pas de se sentir être ceci ou cela. Il s’agit de se
sentir être “tout court”, avant de se sentir être quelque chose de
déterminé.
C’est pour cette raison que la question
fondamentale est : “To be or not to be”. Tout le monde (tous les
gens) et tout le monde (le monde entier) veut être et se sentir être, et par
conséquent lutte pour continuer à vivre.
Pour nous prouver que nous sommes, pour dissiper
le doute sur notre être, il semble qu’il faille que nous ayons toujours un
objectif. Quand nous l’atteignons, nous sentons une certaine satisfaction mais
elle ne dure pas et bientôt nous nous fixons un nouvel objectif. C’est comme si
nous étions accros au tir au pigeon, le pigeon étant dans ce cas un objectif.
Nous ne vivons pas dans le présent, qui est le point d’intersection entre
l’Éternel et le temps, et qui est l’unique moment réellement réel, étant donné
qu’aussi bien les souvenirs que les imaginations concernant le futur ont lieu
dans le moment présent.
Tandis que le bonheur, c’est précisément la bonne
heure, celle du moment présent, celle qui est toujours la bonne heure pour être
conscient d’être présent à la fois dans le temps et dans l’espace.
Et à propos du mot « présent » il est
curieux de voir que ce concept a justement un sens à la fois spatial et
temporel. Le temporel est évident, et le spatial s’appréhende quand, par
exemple, un soldat répond « présent! » pour prouver qu’il est là,
lors de l’appel.
Le présent est toujours présent et c’est le
présent (le cadeau) de la vie intemporelle.
La recherche de la plénitude
Puisque l’unique Réalité est
Être-Conscience-Béatitude, on doit la retrouver dans tous les êtres. Par
conséquent, elle doit se trouver en nous-mêmes, comme il est affirmé aussi bien
dans l’hindouisme, que dans le bouddhisme ou le christianisme (« Le
Royaume de Dieu est en vous ». Mais même si l’être humain croit être
seulement un corps avec ses idées et sentiments, il a néanmoins l’intuition,
plus ou moins confuse et inconsciente, que sa véritable nature, son identité
réelle, est cette totalité, cette plénitude dont il a la même nostalgie que
celle du Paradis perdu. Se croyant séparé d’elle, il souffre et essaie alors de
la réaliser par tous les moyens, licites ou moins licites… À partir de cette
idée-sensation-sentiment d’être un « ego » séparé, il s’efforce pour
acquérir cette totalité. Et dans notre société, dans laquelle on confond l’être
et l’avoir, il tend à embrasser le plus possible en acquérant toujours plus,
parce qu’il croit qu’en ayant davantage, il sera plus. C’est comme s’il voulait s’emparer des
choses pour se les ajouter pour – selon ce qu’il croit – amplifier ou étendre
son Moi. C’est une recherche interminable, une tentative désespérée pour
arriver à sentir sa plénitude, c'est-à-dire sa « complétude».
Cette tendance compulsive à se gonfler pour
combler le doute sur son existence, sur son être, ne se manifeste pas
uniquement dans le désir de possession. Bien qu’il s’agisse d’une aspiration
amplement répandue, il ne s’agit pas toujours d’avoir plus d’argent ou de
biens. Elle peut s’exprimer également sous la forme de la recherche de la
célébrité, du pouvoir, de facultés, de connaissances, etc. Chacun cherchera
naturellement sa pseudo extension dans le domaine qui lui paraît le plus
propice, c’est-à-dire celui où il se voit le mieux armé grâce à ses dons et ses
aptitudes.
Quand quelqu’un a une certaine capacité dans un
domaine particulier, il cultive ce terrain qui, étant cultivé, produit ses
fruits qui réjouissent alors leur apparent propriétaire. Celui-ci, se sentant
affirmé, continue donc avec la même tendance et ainsi se ferme ce cercle
vertueux qui peut consister en une activité gratifiante, un hobby, une passion,
etc. qui lui donne l’impression, comme on dit dans cette expression
affreuse, de « se construire soi-même ». (Seul Dieu pourrait
prétendre se créer lui-même, de lui-même, par lui-même).
Par exemple, on peut désirer le pouvoir. Il n’est
que de voir comment les gouvernants de tous bords s’attachent à lui ; il
semble que leur devise soit : « je commande, donc j’existe ». On
peut également désirer la notoriété pour se sentir affirmé, pour voir son
existence confirmée par les autres, pour que ce qui est « extérieur »
à moi soit allié à ce que je crois être intérieurement. C’est ainsi que le
sportif voudra être le premier, le meilleur, l’unique. Le Don Juan voudra
conquérir toutes les femmes (en réalité, il n’en aime aucune, parce que s’il en
aimait une, il ne l’abandonnerait pas), l’homme d’affaires tendra à gagner le
maximum, l’intellectuel collectionnera les connaissances pour apprendre,
c’est-à-dire ap-préhender le plus possible, etc.
Comme nous pouvons le constater dans ces exemples,
ce besoin de collectionner est très commun. L’un accumulera les voyages, pour
sortir de la routine, pour vivre le moment présent, un autre (ou plutôt
beaucoup d’autres) accumuleront l’argent ou les possessions, un autre les
femmes, etc. Remarquons au passage que celles-ci essaient souvent de conquérir
le monde au travers de leurs enfants ou en conquérant le conquérant…
Dans toutes ces aspirations, il s’agit de
conquérir le monde, en accumulant toujours. « Tener » en espagnol,
signifie “avoir”. Ce mot “tenir” illustre bien cette soif de possession
personnelle. Il s’agit de tenir les choses extérieures (ou du moins que
nous croyons telles), et souvent aussi d’assujettir les personnes. Si nous n’y
réussissons pas, nous nous sentons frustrés.
Mais un autre problème, c’est que ce qu’on acquiert peut se perdre et
c’est pour cette raison que nous vivons dans la crainte de perdre ce que nous
avons. D’une certaine manière, nous sommes possédés par nos possessions. Et le
comble, c’est que toutes ces possessions ne nous comblent pas, parce que, dans
ce processus d’acquisition, plus on a et plus on veut ; c’est comme boire
de l’eau salée : plus on en boit, plus on a soif. C’est comme une drogue,
de laquelle on ne peut plus s’abstenir. Et en effet, on observe souvent que les
plus riches veulent être encore plus riches, même s’il leur est pratiquement
impossible de dépenser tout leur argent.
Mais naturellement cette tentative d’arriver à la
plénitude au moyen des choses extérieures est vouée à l’échec. C’est comme si
une vague, sachant de manière plus ou moins… vague et inconsciente qu’elle est
l’océan, s’identifiait à cette forme particulière de vague et prétendrait
avaler tout l’océan. Mais évidemment la partie ne peut, par définition, arriver
à être le tout. Par conséquent pour être l’océan, la solution pour la vague,
c’est de se rendre compte qu’elle l’est déjà, à condition de ne plus
s’autolimiter dans la forme d’une vague particulière, privée, privative, et de
cesser de se sentir séparée des autres.
La relativité des apparences
Au lieu de nous appliquer à chercher ce que nous
sommes vraiment, nous nous évadons de la réalité en entrant dans la prison des
apparences sans nous rendre compte que notre énergie n’est pas infinie, que
notre temps est limité. Nous ne discriminons pas entre ce qui est important et
ce qui ne l’est pas. Et nous ne regardons pas les choses d’une manière détachée
en voyant la relativité du monde manifesté, c’est-à-dire en observant que tout
ce qui ap-paraît dis-paraît et n’est pas ce qu’il paraît, et n’a par conséquent
qu’une réalité relative. Cette relativité se laisse très bien illustrer par
l’exemple de l’arc-en-ciel qui peut être considéré à la fois comme réel et
comme irréel. Ou comme celui d’un mirage. Nous observerons aussi que voir un
mirage ne constitue pas un problème si nous savons ce qu’il est et n’allons pas
y chercher de l’eau.
A propos de l’arc-en-ciel, nous pouvons constater
que pour qu’un arc-en-ciel
apparaisse, il faut qu’il y ait toujours
trois éléments: le soleil et sa lumière, la pluie, et l’observateur. Si l’un de
ces éléments vient à manquer, le phénomène ne se produit pas. Par ailleurs, il
est significatif que l’observateur se situe toujours entre le soleil et
l’arc-en-ciel.
On pourrait peut-être faire la comparaison
suivante : la lumière de la Conscience (le soleil), passe, comme si elle
était interceptée par un prisme, au travers de la pluie constante des pensées
de l’ego, projetant ainsi le monde avec ses formes et ses couleurs.
Nous pouvons ici citer la comparaison que Ramana
Maharshi fait avec le fonctionnement du cinéma:
·
La lampe intérieure (de l’appareil) est le Soi
·
La lentille qui est face à la lampe est le pur mental proche du Soi
·
Le film, qui est une longue succession de photos séparées, est le courant
des tendances latentes consistant en pensées subtiles
·
La lentille, la lumière qui la traverse et la lampe qui, ensemble forment
la lumière concentrée, représentent le mental, l’illumination du mental et le
Soi qui, ensemble, forment l’observateur
·
La lumière qui traverse la lentille et tombe sur l’écran, c’est la lumière
du Soi qui émerge du mental à partir des sens et tombe sur le monde
·
Les divers types d’images qui apparaissent dans la lumière de l’écran sont
les diverses formes y noms qui apparaissent comme les objets perçus à la
lumière du monde
·
Et finalement le mécanisme qui met en mouvement le film est la loi divine
qui manifeste les tendances latentes du mental.
La question que nous pouvons donc nous poser
est la suivante:
Pouvons-nous nous fier de nos sens ? Les
choses sont-elles vraiment comme on les voit ?
Nous ferons simplement quelques
observations :
Si nous voulons représenter les choses telles
qu’elles sont (selon notre perspective quotidienne et humaine) nous devons
souvent les déformer pour qu’on puisse les reconnaître. Par exemple, une tasse
ou un verre sont circulaires. Mais quand nous voulons les représenter, nous
devons les dessiner comme ce qu’elles ne sont pas, c’est-à-dire comme
elliptiques
Il en va de même pour représenter la perspective.
Si nous voyions toujours le bâton dans l’eau, pour
nous il serait toujours rompu.
L’eau prend la couleur du récipient qui la
contient ou du milieu qui l’entoure.
Sur les écrans de télévision ou d’ordinateurs
n’apparaissent que des points lumineux. Pourtant, ils font sens pour nous qui y
voyons des choses qui nous émeuvent, et qui nous captivent durant des heures.
Et à propos d’écran, on pourrait dire que le monde
nous apparaît comme les images, sélectionnées au hasard, de centaines de films
qu’on aurait rassemblées dans un ordre aléatoire pour un faire un nouveau film.
Les choses nous apparaissent comme très denses
mais nous savons par la science qu’en réalité il y a beaucoup de vide à leur
intérieur. Nous voyons le monde en fonction de nos organes des sens et du
mental. Par conséquent les animaux voient le monde d’une manière assez
différente de la nôtre. Essayons pour un instant de nous imaginer comment une
mouche, par exemple, voit le monde. De la même manière, comment verrions-nous
les choses si on nous les présentait sous la forme d’un film projeté en
accéléré ? Comment vivrions-nous si on nous collait, sans que nous
puissions l’enlever, un télescope ou un
microscope sur les yeux ? En outre, quel degré de réalité peuvent
avoir des choses qui ne durent pas ? Or nous savons très bien que rien ne
dure éternellement.
Le monde semble très réel mais ce n’est qu’un
tissu de perceptions dont la trame et les motifs sont constitués par les
impressions sensorielles interprétées par le mental au fil de la conscience qui
relie les événements comme les perles d’un collier.
Et nous, nous nous laissons dériver au fil de la
vie. Etant donné que “Là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur» (Matthieu,6 :21), nous nous dispersons en une multitudes d’activités mondaines au lieu « d’amassez des trésors dans le ciel, où la teigne et la rouille ne détruisent point, et où les voleurs ne percent ni ne dérobent » (Matthieu,6 :19)…
Au lieu d’essayer d’approfondir la question et de
nous attaquer aux racines du problème - qui est le sens de l’ego -, nous nous
perdons dans les distractions et les divertissements, au sens pascalien du
terme. Toujours, nous regardons vers l’extérieur, et au lieu de respecter le
commandement “Tu n'adoreras pas d'autres dieux que Moi”, nous nous
laissons hypnotiser par la propagande et adorons le Veau d’or de cette société
de consommation (ou de consolation, comme on l’a dit). Cette attitude est
finalement source de conflits et de guerres. Et une partie de la population du
monde meure de trop manger tandis qu’une autre meurt de sous-nutrition…
Nous devrions au contraire essayer de simplifier
un peu notre vie et fomenter l’introspection pour qu’un regard purifié, et donc
éclairci, nous permette un certain détachement, c’est-à-dire, nous permette de
décoller toutes ces étiquettes qui adhèrent aussi bien à nous-mêmes qu’aux
autres, nous empêchant ainsi de voir ce qu’il y a au-dessous.
Quand nous nous retournons vers la source qui
émane toujours de l’Incognoscible avant d’être contaminée par tous les
concepts, nous pouvons nous interroger:
Quel âge a “ce” qui sait: “j’ai quarante ans”? De
quel sexe est ce qui sait: « je suis une femme », ou: « je suis
un homme » ? Ce qui dit: “je suis malade” ou: “je suis bien portant”
est-il malade? Ce qui dit en nous: “je suis riche” ou: “je suis pauvre” est-il
riche ou pauvre ? Le corps peut être jeune ou vieux, mais est-ce lui qui
dit « je suis jeune » ou : « je suis âgé » ? Ce qui
voit : « je suis assis » ou « je suis debout » est-il
assis ou debout ?
Le corps peut-il voir ou savoir quelque chose par
lui-même? Peut-il savoir, par lui-même, qu’il existe? Réellement, cela a-t-il
du sens de dire: “je suis français” ou : “je suis corse, ou suisse,
ou chinois” ? Ou encore : « « je suis grand, petit,
gros, maigre, cultivé, ignorant, etc. » ?
D’autre part, existe-t-il vraiment un mental comme
tel ? Ce que nous appelons “mental” est une entité réelle ou bien une
collection d’idées en forme de craintes et d’espoirs fondés sur les expériences
du passé et les projections dans le futur ? Sommes-nous le mental ou bien
ce qui voit le mental ?
Une pensée ne peut être le témoin de rien et dix
millions de pensées pas d’avantage.
Nous nous identifions au contenu de notre mémoire,
mais celle-ci peut-elle appréhender quoi que ce soit ?
Comme nous regardons dans la mauvaise direction,
nous sommes rarement satisfaits et il semble toujours qu’il nous manque quelque
chose (c’est peut-être dans ce sens qu’il faut entendre l’affirmation de
Bouddha : « Tout est souffrance »). Espérant toujours arriver à
être quelque chose, ou plutôt quelqu’un, ou au contraire craignant de ne plus
être ce qu’on croit être maintenant, nous ne vivons jamais le moment présent,
Nous espérons toujours gagner. Non seulement de
l’argent. Non seulement à la loterie ou avec « notre » équipe de football. Nous espérons toujours
avoir de la chance, dans les questions de travail, d’amour, etc. Mais
l’espérance, d’une certaine manière, est une création de l’ego pour pouvoir
survivre. Et c’est pour cela que cette espérance est létale et que nous passons
notre vie en train d’espérer au lieu de vivre le moment présent et d’agir. Nous
sommes endormis, et donc toujours en train de rêver. Nous rêvons à propos des
hommes ou des femmes, des vacances, du travail que nous allons avoir ou au
contraire nous rêvons de ne plus devoir travailler, etc.
Quant aux chercheurs spirituels, ils rêvent au
Réveil…
Comme l’âne qui essaie d’attraper la carotte qu’on
lui a attaché devant la tête, ou comme un homme qui a trébuché et doit courir
pour retrouver son équilibre, nous pratiquons constamment la fuite en avant en
essayant d’attraper l’ombre fantasmagorique de nous-mêmes que nous projetons
sous forme de projets et d’attentes.
Mais tout comme le pot que la laitière de la fable
portait sur la tête, tous les schémas que nous avons dans la tête peuvent se
rompre en un instant…
La recherche du bonheur
Étant donné que notre nature authentique est être,
nous sentons du bonheur quand après avoir
évité un malheur ou après avoir obtenu ce que nous désirions
intensément, ou encore quand nous récupérons ce que nous croyions avoir perdu,
nous nous sentons bien. Ouf ! Nous nous détendons dans un soupir de soulagement,
nous nous vidons de notre faux moi (le “je” particulier, fictif) et en ce
moment-là, nous nous sentons vivre, nous nous sentons être, simplement. Alors,
durant un laps de temps proportionnel à l’intensité du danger ou de notre
aspiration, nous sommes heureux, parce que nous demeurons tranquilles dans le
pur Être, c’est-à-dire, dans cette sensation-sentiment d’être, sans
plus, sans qualifications. Mais bientôt le doute nous reprend et nous
recommençons à nous pré-occuper. Et nous voilà de nouveau en train de penser à
acquérir ou conserver quelque chose.
Normalement, on essaie de se mettre en contact
avec la situation, l’objet, la personne, etc. qui nous affirme, qui fait qu’on
se sente exister et qui confirme ainsi notre existence. Alors nous disons que
nous aimons ce lieu, cette situation ou cette personne. L’élément extérieur à
nous est utilisé pour satisfaire notre narcissisme comme le montre d’un manière
très symptomatique la tournure: « je me plais à Paris ». Il y
identification et attachement.
C’est pour cette raison que chacun d’entre nous
avons souvent tendance à nous mettre dans les mêmes situations, à réaliser les
mêmes actions, à fréquenter les mêmes lieux, les mêmes personnes, etc., dans
une tentative de nous retrouver dans les mêmes situations externes dans
lesquelles nous avons été heureux, espérant ainsi revivre ce bonheur que nous
attribuons aux éléments extérieurs.
Et naturellement, le même processus se déroule
dans la situation inverse, c’est-à-dire lorsque nous somme niés par quelque
chose ou par quelqu’un. Dans ce cas, nous avons tendance à fuir cette situation
ou cette personne.
Nous recherchons les stimuli, externes ou
internes, susceptibles d’ « activer » ce bonheur intérieur. Mais
si ces stimuli viennent à manquer, ou à l’inverse, quand ils cessent de
présenter un aspect positif, le bonheur se transforme en malheur. Par exemple
si notre petit ami, ou notre petite amie, nous quitte, le même “objet” qui nous
apportait la félicité est maintenant source d’amertume, de frustration et de
désespoir.
Nous réussissons souvent à renouveler ce bonheur
passé, mais fréquemment aussi nous nous retrouvons contrariés et déçus, parce
qu’il n’y a plus adéquation entre la situation extérieure et l’état
interne.
On essaie de combler le vide intérieur engendré
par l’oubli de l’être profond par l’avoir d’un nombre sans fin (y
si on y pense un peu, sans finalité réelle) d’objets extérieurs. Notre
« civilisation », avec son capitalisme et son consumérisme débridés,
se fonde sur l’avidité et la cupidité humaines, qui riment avec stupidité. En
dernière analyse, tous les problèmes et tous les maux, aussi bien personnels
que collectifs, plongent leurs racines dans l’ignorance. C’est pourquoi leur
solution se trouve dans la connaissance. Malheureusement, celle-ci ne doit pas
être uniquement intellectuelle, mais vécue de manière effective.
Nos joies et nos chagrins nous paraissent bien
réels, mais pourquoi s’évanouissent-ils avec le temps?
En réalité, comme nous l’avons vu, cette félicité
est toujours en nous, au-dessous des pensées, comme la profondeur de l’océan
est au-dessous des vagues. Tout comme le soleil brille toujours derrière les
nuages ou la Terre, la félicité demeure toujours comme Conscience d’Être
derrière, ou au-dessous, de toutes nos pensées et sentiments. Car tous les plaisirs
ne sont finalement rien d’autre qu’un reflet de l’immuable béatitude du coeur.
Mais
pourquoi est-ce que Dieu ne nous a pas donné pleine Conscience depuis le
commencement ?
- Une réponse allégorique pourrait être: parce que
son jeu (Lila en sanscrit) consiste à jouer à cache-cache avec lui-même…
Il se cache pour avoir le plaisir de se redécouvrir ; il s’éloigne de
lui-même pour avoir la joie de se retrouver.
Ou bien nous pourrions dire également que l’Être
crée une infinité d’instruments pour pouvoir s’appréhender Lui-même sous une
multiplicité de formes distinctes. En effet par la création de l’Univers,
l’Être, tout en restant identique à Lui-même, engendre une multitude de foyers
de conscience individualisés susceptibles d’arriver à participer à son état de
Conscience Absolue.
La pensée de l’Être, sous la forme particularisée
qu’est l’être humain, contient potentiellement la réalisation de l’aspiration
secrète qui a motivé le déploiement cosmique de la Création: arriver à être
capable de percevoir Sa propre conscience.
Le problème du mal
Comment peut-on expliquer qu’il y ait autant de
malheur et de méchanceté dans le monde?
Comme il nous manque une vision d’ensemble il nous
semble, de prime abord et à partir de notre point de vue relatif et limité, que
le monde est plein de désordres. Nous ne devons pas nier ces derniers, ni les
ignorer, mais au contraire essayer d’y remédier dans la mesure de nos
possibilités. Mais si nous réfléchissons, nous pouvons comprendre que
l’harmonie universelle, l’Ordre cosmique, résulte de la somme de tous les
désordres partiels. Nous pouvons citer ici l’étymologie du mot cosmos:
« il vient du latin cosmos qui signifie univers, et provient
lui-même du terme grec κόσμος (kósmos), qui signifie ordre ou ornement, étant l’anti-thèse de caos ». Utilisant une image, on a
dit que le Cosmos était comme un tapis: nous, nous en voyons le revers et par
conséquent nous percevons un ensemble de fils désordonnés, tandis que Dieu, qui
le saisit « du bon côté », à savoir à l’endroit, le voit comme parfait.
(C’est-à-dire, selon l’étymologie de ce mot: achevé, complètement ou
totalement fait).
On pourrait dire aussi que le monde est comme un
puzzle dont nous ne voyons que des pièces éparses. Tandis que celui qui voit
toutes les pièces à leur place et en relation avec les autres perçoit l’harmonie du tout.
Où un analphabète ne voit que des traits d’encre
sans aucun sens pour lui, nous pouvons lire un poème merveilleux.
Tout est relatif (bien que cette affirmation le
soit aussi). Prenons un exemple pour l’illustrer:
Imaginons une famille en train de voir un
documentaire sur les animaux de la savane africaine :
Un troupeau de gazelles est en train de paître
tranquillement quand, tout à coup, un lion surgit, saute sur une jeune gazelle
et l’emporte. Toute la famille s’émeut et les enfants se fâchent contre le
vilain lion. Maintenant, imaginons la même famille en train de regarder la même
scène mais après avoir vu la scène suivante : dans la savane africaine
règne une terrible sécheresse. Un groupe de lions est en train de mourir de
soif et de faim par manque de nourriture. Un lionceau est sur le point de
mourir. Sa mère a essayé de chasser mais n’a rien réussi à rapporter. Tout à
coup, elle détecte un groupe de gazelles. Elle se rapproche à pas de loup - on
plutôt de lion - et…vous connaissez la
suite de l’histoire. Toute la famille se réjouit et les enfants battent des
mains… Exactement la même scène, avec les mêmes personnages, le même décor, la
même situation et les mêmes images provoque deux réactions diamétralement
opposées…
En réalité, nous ne pouvons jamais savoir ce qui
est bien et ce qui ne l’est pas. Si une personne meurt dans un accident, nous
pensons que c’est terrible, mais si nous savions que cette personne ignorait
elle-même qu’elle avait un cancer incurable et qu’elle allait mourir bientôt
dans d’horribles souffrances, notre perspective changerait.
De la même manière, un chemin très mauvais peut
déboucher sur une piste agréable, tandis qu’une piste magnifique peut nous
emmener dans un cul-de-sac ou terminer en un sentier plein de boue et de
ronces.
La destruction est nécessaire pour créer du
nouveau et éviter de cette façon la sclérose. Ainsi, tout comme le chaud et le
froid ne sont que température, la vie est faite d’autant de destructions que de
création, d’autant de morts que de naissances. Cependant, nous désignons la
synthèse de ces deux tendances par le mot vie et non pas avec le mot mort.
De manière similaire, nous disons que la semaine est faite de sept jours
et non de sept nuits, bien qu’il y ait autant d’obscurité que de clarté.
Mais la bonne nouvelle (et on
peut observer que l’étymologie de Évangile, c’est précisément Bonne
Nouvelle) la bonne nouvelle, c’est que nous ne sommes pas ce que nous croyons.
Nous n’avons pas besoin de tout accumuler. « Considérez comment
croissent les lis: ils ne travaillent ni ne filent; cependant je vous dis que
Salomon même, dans toute sa gloire, n'a pas été vêtu comme l'un d'eux »
(Luc 12 : 27), parce qu’en réalité nous ne sommes pas le corps mais la
Conscience-en-Soi. Par conséquent, l’idée d’être ce corps doit diminuer et la
conscience d’être la Conscience doit croître.
Ce qui importe, c’est d’être
conscient d’être conscient.
Alors, si en réalité nous sommes
Être-Conscience-Béatitude, pourquoi ne nous en rendons-nous pas compte?
- L’être humain voit, mais le problème, c’est
qu’il voit dans la pénombre. S’il ne voyait rien, c’est-à-dire s’il n’avait
conscience de rien, il n’aurait pas de problèmes. S’il voyait tout clairement,
c’est-à-dire s’il avait une conscience parfaitement claire, il n’aurait pas de
problèmes non plus. C’est seulement dans la pénombre que les fantasmes
paraissent surgir.
La nature double de l’être humain
L’émergence du sentiment de l’ego est illustrée
dans la Genèse par l’Arbre de la science du Bien et du Mal.
Rappelons-nous l’allégorie du Paradis terrestre
d’où l’homme fut expulsé. L’homme vivait alors en harmonie avec les animaux
puis il commença à se distinguer d’eux
en devenant auto-conscient et en discernant entre el Bien et le Mal, perdant
ainsi son innocence et son absence de problèmes existentiels, ou métaphysiques.
Dans le royaume animal, il n’existe pas de dualité
morale Bien-Mal. Les animaux sont nus mais ils n’en ont pas honte. Ils ont ce
sentiment de « je », mais ils ne savent pas qu’ils l’ont, alors que
l’espèce humaine, elle, l’a. (Indépendamment du fait que les recherches
modernes suggèrent que les animaux les plus évolués pourraient l’avoir
également).
Actuellement, c’est comme si la Conscience unique,
omniprésente et éternelle, au lieu de se rendre compte de ce qu’elle est
réellement, s’autolimitait dans l’être humain sous la forme d’un corps animal
et d’un mental humain avec tous ses contenus.
Personnellement, je pense que l’explication du
sens de l’ego et de cette autolimitation pourrait s’expliquer, peut-être, de la
manière suivante: à la différence des végétaux, les animaux doivent être
autoconscients pour pouvoir distinguer entre eux-mêmes et les autres êtres,
afin de pouvoir fuir pour ne pas être mangé, ou au contraire, pour attaquer et
se nourrir. La structure psychique de l’animal est donc programmée pour
distinguer de forme automatique entre son corps et tout le reste de son
environnement.
L’animal doit pouvoir protéger son organisme en
sachant différencier quel animal est une proie possible et quel autre est un
prédateur potentiel pour lui. Il doit également pouvoir distinguer entre son
corps et celui des autres. Sinon, il pourrait en arriver à se manger sa propre
patte!
Dans l’être humain qui, physiquement, est un
animal, ce sens d’un « je » distinct demeure, mais comme il possède
un intellect qui lui permet de pressentir qu’il est quelque chose de plus qu’un
corps animal, il se retrouve déchiré entre, d’une part, ses tendances animales,
ou matérielles, et d’autre part, son aspiration au subtil, ou spirituel.
Cette partie double de la nature humaine a été
représentée dans la mythologie grecque par le centaure. Selon la mythologie
chinoise, l’homme est l’intermédiaire entre le Ciel et la Terre, entre l’esprit
et la matière. Dans le symbolisme hébraïque, le sceau de Salomon, ou étoile de
David, comporte deux triangles inversés ; celui qui pointe vers le bas symbolise,
entre autre, l’esprit qui descend et s’incarne dans la matière, tandis que
celui qui pointe vers le haut représente la matière qui sert de base pour
s’élever vers le spirituel.
Cette distinction entre moi et non-moi ne se
réfère pas seulement au corps. Par projection, elle s’étend à tous les domaines
de la vie. Et de la même manière qu’un animal, s’il le peut, lutte bec et
ongles pour protéger son corps et celui de sa progéniture, l’être humain défend
à tout prix son fameux moi et tout ce qui, par les mécanismes de projection et
d’identification, lui paraît être lié à lui. Ce processus est semblable à une
pyramide à l’envers qui repose sur sa pointe: enfant, il commence par
s’identifier peu à peu à son corps, puis à ses parents, ensuite à son milieu, à
« son » pays, aux enfants de ses enfants, à ses idées, à ses opinions
qu’il aime décorer du nom d’idéaux, et surtout à l’idée qu’il se fait de
lui-même, c’est-à-dire d’être un ego séparé.
Mais comme l’être humain a la possibilité de
reconnaître ce qu’il est vraiment, c’est-à-dire la Conscience-en-soi, sa tâche
consiste à s’efforcer de se libérer de l’idée d’être seulement un organisme
psychosomatique et, au travers de l’étude, la réflexion, l’activité
désintéressée, la méditation, etc. mettre en pratique la connaissance théorique
qu’il a pu obtenir.
Il convient d’observer qu’en réalité, si on
l’analyse avec la profondeur suffisante, qui entreprend ce voyage et qui le
mène à son terme, c’est la propre Conscience ou, si on préfère, Dieu lui-même.
Remise en question du chercheur
Le problème est que normalement, ou plutôt
habituellement, l’homme commence à réfléchir sur la vie à partir de ce qu’il
croit être, c’est-à-dire uniquement un être humain avec un corps, un nom, un
âge déterminé, etc. Pour lui, c’est une évidence qu’il est cela et il part de
ce principe sans le remettre en question. Il commence donc à se poser des
questions - s’il se les pose - à partir de ce point d’observation qui, en fait,
est fictif. Il ne se pose pas la question de savoir s’il est vraiment le point
de départ de sa faculté de connaître. Il ne remet pas en cause la réalité de
celui qui initie la recherche. Il ne sonde pas la nature du chercheur.
Cependant, c’est un point capital parce que si le chercheur est faux, ses
conclusions le seront aussi.
La tâche de l’être humain dans ce monde consiste
donc à chercher “sa” divinité, son authentique nature cachée au plus profond de
lui-même comme le trésor que selon une allégorie, les dieux, jaloux de leurs
prérogatives, cachèrent dans le seul lieu où il ne penserait jamais le
chercher : à l’intérieur de lui-même. L’homme étant, comme il a été dit,
mi-ange mi-bête, il doit vaincre sa nature animale pour que l’esprit triomphe
en lui. Il doit cesser de se comporter comme un animal, parce que ce n’est pas
sa vraie nature, et purifier son mental pour que puisse se refléter en lui la
lumière de l’esprit, sa nature divine.
Pour nous, cette conscience ordinaire, cette
idée-sensation-sentiment du “je » personnel, est la chose la plus
précieuse que nous paraissons avoir. Mais il faut être disposé à sacrifier
l’idée d’être ce corps, comme le fit Jésus-Christ qui s’incarna pour nous
enseigner, par l’exemple de sa crucifixion, le chemin qui conduit à la vie
éternelle de la Conscience omniprésente. En d’autres termes, le fils de
l’homme, c’est-à-dire l’idée « je suis un tel » doit être sacrifié
pour que, l’idée d’être seulement un organisme psychosomatique disparaissant,
la conscience individuel se rende compte de sa véritable nature, qui est la
même que celle du Père, et puisse ainsi accéder à la vie éternelle.
Cette affirmation se reflète aussi dans le
bouddhisme, avec l’idée de l’extinction pour accéder au nirvana. Elle se
retrouve aussi dans le soufisme sous le terme de “Fana”, qui signifie
précisément extinction (de l’idée d’un moi personnel).
Ainsi on peut comprendre pourquoi :
·
“Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d'une aiguille qu'à
un riche d'entrer dans le royaume de Dieu”. (Au sujet de cette curieuse image,
certains experts disent qu’il y eut une confusion dans la traduction des mots
grecs kamelon qui signifie “chameau”, et kamilon qui désigne une
“grosse corde avec laquelle on amarre les bateaux au quai”. En outre, en
araméen, gamla peut signifie aussi bien chameau que corde (faite de
poils de chameau).
Notons que cette richesse ne doit
pas forcément être matérielle. Il s’agit de ne pas s’attacher à ce que nous
croyons être nos possessions, que celles-ci se présentent sous forme de biens,
d’enfants, de succès, de connaissance, d’idées, etc.
·
“Plusieurs des premiers seront les derniers,
et plusieurs des derniers seront les premiers” (Marc 10:31).
·
“Si quelqu'un veut venir après moi,
qu'il renonce à lui-même, qu'il se charge de sa croix, et qu'il me suive. Car
celui qui voudra sauver sa vie la perdra, mais celui qui la perdra à cause de
moi la trouvera” (Matthieu 16: 24, 25).
·
“Je te loue, Père, Seigneur du
ciel et de la terre, de ce que tu as caché ces choses aux sages et aux
intelligents, et de ce que tu les as révélées aux enfants” (Matthieu 11: 25,
26).
·
“Je vous le dis en vérité, si vous ne
vous convertissez et si vous ne devenez comme les petits enfants, vous n'entrerez
pas dans le royaume des cieux” (Matthieu 18: 3). (Parce que les petits enfants
vivent dans le présent, et le présent est un cadeau, le cadeau divin qui est le
pont entre l’être humain éphémère et L’Éternel. Nous pouvons observer également
que L’Éternel est l’un des noms qui désignent Dieu dans la Bible). Le Dieu vivant est
dans le présent.
L’être humain ordinaire (nous-mêmes) se situe
entre deux extrêmes. D’un côté, il y a le “Moi et le Père nous sommes
un” (Jean 10: 30) et par conséquent nous aussi, parce que si Dieu est
notre Père, nous sommes ses enfants) et d’un autre côté le : “Tu es
poussière, et tu redeviendras poussière” (Genèse 2:19).
Ce Père qui est dans les Cieux, qu’est-ce que
c’est? Ne serait-ce pas ce qui nous fait dire « je » à chacun d’entre
nous ? Ce « je » commun à tous? En effet, nous n’avons pas un
“petit je” et un “grand je”. Il n’y a qu’un “Je”: le seul et unique “Je”. C’est
le “Je”, de toujours, de tous et de tout. “Dieu dit à Moïse: Je suis celui
qui suis” (Exode 3:14)
et : “Jésus leur dit : en vérité, en vérité, je vous le
dis, avant qu'Abraham fût, je suis” (Jean 8: 57).
Tout se passe comme si Cela, Ce qui est, Dieu,
s’identifiait au corps et au mental. Mais c’est ce corps qui est poussière et
qui ne perdurera pas, ni non plus les contenus du mental. C’est pour ça
que : « Il faut qu'il croisse, et que je diminue » (Jean 3:
30), c’est-à-dire que la conscience de ce “Je” unique doit substituer
la conscience de se croire un tel ou une telle.
Pour trouver sa véritable nature, et par
conséquent la félicité, l’être humain doit lutter contre la force d’inertie qui
le fait tomber et retomber dans le rêve de l’état de veille.
La lutte entre la lumière de l’esprit et les
ténèbres de la fausse identification à l’homme, à un “je” privé, est illustrée
par de nombreux contes et mythes. Ainsi, Aladin doit récupérer la lampe magique
(la lumière de la conscience) sans regarder les pierres précieuses le long du
couloir (les richesses et les plaisirs de ce monde) pour la remettre au
magicien pervers et avide de pouvoir (le moi). C’est Hercules luttant contre
l’Hydre aux têtes qui se renouvellent sans cesse (le moi aux mille visages),
Saint Michel luttant contre le dragon qui garde l’entrée du trésor caché (tout
au fond de lui), le Prince noble et courageux qui, après avoir traversé un bois
épais et obscur, doit réveiller La Belle au bois dormant pour l’épouser (s’unir
à la Conscience). Nous pouvons dire en passant que, dans l’Islam, la grande
guerre sainte, la Yihad (qui peut aussi se traduire par “effort” pour
suivre les précepte de l’Islam) est dirigée contre soi-même, contre nos propres
passions, tandis que la petite guerre est contre les ennemis extérieurs.
Dans la même perspective, rappelons-nous aussi le
verset: “Je ne suis pas venu apporter la paix, mais l'épée” (Matthieu
10: 34).
Dans les contes, le thème du sommeil est
récurrent. Mais qu’est-ce donc qui dort si ce n’est notre intelligence qui crée
ses propres songes et mensonges?
Nous avons Blanche-Neige, l’intelligence de
l’esprit, pure et immaculée comme la neige vierge, c’est-à-dire non
conditionnée, vide de contenus, de complexes, de traumas, etc., qui a été
endormie avec le cadeau empoisonné par la jalousie de la sorcière (le moi qui
veut posséder égoïstement les attributs de la Conscience) et qui doit être
réveillée par l’amour du Prince, du Principe Unique, de l’Esprit. Notre
véritable nature obscurcie est aussi représentée par le vilain petit canard qui
ne sait pas qu’il est un cygne jusqu’à ce qu’il se mire dans le miroir de
l’intellect purifié dans lequel se reflète la blancheur immaculée et la pureté
de la Conscience.
Nous pourrions continuer avec d’autres histoires,
par exemple celle du petit lion qui ne sait ni qu’il est un lion, ni qu’il est
le roi d’un royaume usurpé par son oncle avide (le sentiment de l’ego). Ou bien
encore avec le conte de la Belle et la Bête : par amour pour son père (son
origine), la Belle fera retrouver à la Bête (le moi illusoire, fictif) son aspect
antérieur authentique, c’est-à-dire, sa véritable nature originale (le vrai Moi
unique). Ainsi est illustrée la mission de l’homme sur la Terre qui est donc de
transformer sa nature animale en nature divine et, par son effort dû à la grâce
de Dieu, se hisser au sommet des profondeurs qui sont en lui.
Entre parenthèses, nous pouvons observer que les
contes de fées, les contes pour enfants qui, vus à partir d’un rationalisme
étriqué ne comptent pas, contiennent en réalité plus de vérité que ce qu’on nous
ra-conte dans les moyens d’in-formation et dans les livres scientifiques (qu’il
est d’autre part très bien de lire quand ils sont écrits par des scientifiques
honnêtes et sérieux) qui nous fournissent des “vérités provisoires”. Mais une
vérité provisoire est-elle encore une vérité?
Ajoutons en passant que nous devrions nous
intéresser davantage et avoir une plus grande confiance dans les contes pour
enfants que pour les contes (et les comptes) des politiciens.
Les paraboles remplissent la même fonction que les
contes, comme le montre celle du bon marchand: comme lui, nous devons vendre
tous les bijoux de moindre valeur (les biens de ce monde) pour pouvoir acquérir
le joyau suprême de notre authentique nature.
Toutes les religions et traditions spirituelles
pointent dans la même direction et nous encouragent à trouver cette véritable
nature :
·
« Connais-toi toi-même et tu connaîtras
l’univers et les Dieux » (Inscription au seuil du Temple de Delphes).
·
« Et que servirait-il à un homme
de gagner tout le monde, s'il perdait son âme? Ou que donnerait un homme en
échange de son âme ?» (Matthieu
16:26). En effet, de quoi sert-il de
connaître le monde entier si on ne se connaît pas soi-même ; de posséder la
terre entière si on ne sait pas qui en est son propriétaire ?
·
« Cherchez et vous
trouverez » (Matthieu 7: 7).
·
« Cherchez plutôt le royaume
de Dieu; et toutes ces choses vous seront données par-dessus » (Luc 12: 31).
·
« On ne dira point: Il est
ici, ou: Il est là. Car voici, le royaume de Dieu est au milieu de vous » (Luc
17: 21).
Le sens du moi illusoire et fictif, pourrait être
représenté par Satan, l’adversaire, celui qui ne se soumet pas à la volonté de
Dieu, celui qui veut être Son égal; c’est l’usurpateur, la partie qui se prend
pour la totalité.
La vie après la mort
Les religions nous parlent toujours de la vie
après la mort, mais personne n’en est revenu pour nous dire s’il y a quelque
chose après la vie sur terre.
- Si on admet l’existence de la télépathie, par
exemple, cela signifie qu’il y a des
moyens de connaissance que nous ignorons et que ceux-ci peuvent, au moins dans
une certaine mesure, s’affranchir des obstacles du temps et de l’espace. Alors,
est-ce qu’il est totalement absurde de penser que des personnes qui éprouvaient
une grande sympathie et une forte connivence entre elles durant leur vie
puissent établir un contact quand l’une d’elles passe à un état
post-mortem ?
D’un autre côté, celui qui a atteint le sommet
d’une montagne jouit d’une meilleure vue que celui que est resté à son bas. Dès
lors, pourquoi ne pas admettre qu’il existe des niveaux de conscience
supérieurs qui permettent une vision plus profonde et plus ample de la
réalité ?
La réincarnation existe-t-elle ?
- Nous n’avons pas pu naître du Néant. Il n’y a
pas d’effet sans cause. Évoquer les gènes équivaut à attribuer la
responsabilité d’une bonne ou d’une mauvaise nouvelle à la lettre qui
l’apporte. Ma naissance doit être la conséquence de quelque chose. De la même
manière qu’un poirier est né de la semence d’une poire, un être humain doit,
d’une certaine manière, avoir existé potentiellement avant de naître.
Mais si la réincarnation existe, qu’est-ce qui se
réincarne ?
- De la même manière que le concept de Dieu varie
d’un individu à l’autre, il existe aussi des concepts plus spécifiques qui sont
également des projections personnelles. Ainsi par exemple, le concept de
réincarnation a suscité de nombreuses croyances, certaines plus fantaisistes
que d’autres, étant donné que l’idée de la réincarnation nous a été présentée
en Occident sous un aspect déformé qui la rend plaisante pour l’ego et
par là même dangereuse (car si on évolue automatiquement, pourquoi nous presser
et nous efforcer intensément ?)
Habituellement on s’identifie à son nom, son sexe,
son métier, sa nationalité, son statut social, ses possessions, ses vertus et
ses défauts; on s’identifie comme étant fils ou fille, père ou mère, etc.… Mais
si on observe bien, on peut voir que tous ces attributs proviennent de
l’identification-racine qui est celle de l’identification au corps. Elle se
fonde sur la croyance que nous sommes ce corps.
Mais si nous renaissons, comme nous n’aurons pas
le même corps, nous n’aurons pas le même cerveau et par conséquent les contenus
cérébraux du corps antérieur auront disparu. De cette façon, nous ne nous
souviendrons plus des événements vécus alors. C’est comme si, dans notre
situation actuelle, nous perdions la mémoire. Qu’en serait-il de nous? Vu à partir
de notre propre perspective, nous n’aurions plus ni nom, ni parents, ni pays,
ni statut social, ni profession, ni possessions, etc.
Ce qui perdure, selon les Enseignements, ce n’est
pas la même personnalité mais les tendances profondes, les empreintes ou les
traces laissées dans la psyché par les expériences passées. Il est dit que
c’est semblable à l’odeur qui reste dans un récipient après que son contenu a
disparu. Il faut souligner en effet que s’il est bien vrai que la mémoire
physique du cerveau disparaît, la mémoire extra-cérébrale de l’âme et de
l’esprit, elle, demeure.
Si nous faisons une comparaison avec des bougies
qu’on allume les unes avec les autres, on peut dire que ce qui subsiste, c’est
la flamme ; les bougies fondent mais la flamme demeure. C’est la même
flamme qui subsiste en des corps différents. Les corps successifs sont les
bougies mais ce qui se manifeste dans la matière sont les caractéristiques non
matérielles. De la même manière qu’une bougie constitue la possibilité de manifestation
de la flamme, le corps constitue la possibilité de manifestation de l’âme. La
bougie est la sub-stance (sub, dessous, stare, être),
c’est-à-dire ce qui est au-dessous, le support. Remarquons en passant que la
tendance de la cire est d’aller toujours vers le bas, et celle de la flamme de
se diriger vers le haut. Serait-ce dû au hasard? Ou est-ce très
symbolique?
Comment la psyché peut-elle
exister sans un corps ?
-
Dans la vie incarnée, la psyché se manifeste en utilisant le corps physique et
le cerveau.
Une détérioration du cerveau peut priver la
psyché, de manière plus ou moins complète, de ses moyens d’expression. De la
même manière que lorsqu’une radio s’abîme, ni la station émettrice, ni les
ondes ne disparaissent, l’impossibilité de s’exprimer où se trouve la psyché ne
signifie pas qu’elle n’existe plus.
Le cerveau ne fabrique pas la pensée, mais il
permet l’expression de la psyché dans le monde physique.
Si on entend jouer un morceau de piano, un enfant
pourrait croire que la musique est due au mouvement des touches du piano. Mais
tout le monde sait que la touche ne fait qu’activer une espèce de petit marteau
qui frappe une corde pour la faire vibrer. La musique est-elle expliquée pour
cela ? Il faut trouver sa source plus haut dans son déterminisme en
remontant par les doigts du pianiste, puis par ses bras, pour en arriver
finalement à son cerveau dans lequel se déroulent des processus chimiques qui
déclenchent les mouvements des doigts. A-t-on pour alors expliqué la musique et
surtout son harmonie ? (Si l’on disait qu’il n’y a pas d’harmonie, que
c’est une cacophonie nous ferions appel à l’idée, à l’archétype, de
l’Harmonie). Ne faut-il pas évoquer une Intelligence et une sensibilité
supérieure ?
Par conséquent, la question fondamentale qui
devrait nous préoccuper est la suivante : mon comportement dans la vie,
c’est-à-dire l’ensemble de mes actes, sentiments et pensées auront-ils des
conséquences, pour moi et pour le(s)
monde(s) ?
Observation à propos du mot Seigneur
Quand on parle du Seigneur, on
« personnifie » Dieu, on parle de Lui comme d’une personne, parce que
pour pouvoir communiquer avec des personnes, Il doit se manifester en tant que
personne. En effet, avec notre mental limité, il nous est difficile, même impossible,
de nous Le représenter comme Il est réellement, a savoir : sans
commencement ni fin, Illimité, Omniprésent, Omniscient, Tout-puissant et
Éternel.
D’autre part, c’est aussi le Seigneur dans le sens
de propriétaire parce que nous devons tout à Cela. Rien n’est à nous excepté la
bêtise. Tout le Bien que je fais est de Dieu, tout le mal est de moi.
Rien n’est à nous parce que nous, nous n’avons
rien fait. Ni le corps, comme nous l’avons vu, ni les éléments qui nous
permettent de vivre : l’eau, la terre, le soleil, etc. Nous ne faisons pas
circuler notre sang. Nos cellules changent sans nous demander notre opinion.
Nous dépendons du boulanger et du docteur, du chef et du client. Nous sommes
conditionnés. Conditionnés par nos gènes, notre caractère, le contenu de notre
mémoire, la famille et le milieu socioculturel. Les structures du mental sont
le produit de l’espèce et de l’époque. À l’intérieur de ces structures, les
idées viennent et se succèdent indépendamment de notre volonté.
D’autre part, à qui devons-nous
l’intelligence humaine? Est-ce nous qui faisons notre intelligence et notre
volonté ? Si c’est le cas, pourquoi en avons-nous si peu, alors que tout
monde veut en avoir plus ?
Le libre arbitre
Alors, nous n’avons pas de libre arbitre?
- On ne pourra pas résoudre la question du libre
arbitre si on ne fait pas attention à distinguer deux plans: celui de l’Absolu
et celui du relatif.
1) Le plan de l’Absolu, de
l’Intemporel.
Dans l’Absolu règne un ordre total, parfait,
résultant de la somme de tous les déséquilibres partiels qui se créent dans la
manifestation. Il n’y a aucune dualité en lui, parce qu’étant tout, rien ne
peut lui être opposé.
En outre, comme Dieu est tout-puissant, rien ne
peut s’opposer à Sa volonté.
Si on dit que les choses arrivent au gré du
hasard, nous dirons que prétendre que le hasard existe revient à dire qu’une
chose peut exister sans une cause. En dernière analyse, cette affirmation est
cependant exacte parce qu’une chose n’existe pas grâce à une chose mais
grâce à toutes les choses. En effet, une chose est comme elle est, parce
que toutes les autres choses sont comme elles sont.
Nous sommes comme des marionnettes qui paraissent
agir par elles-mêmes dans le théâtre qu’est le monde, tandis qu’en réalité nous
sommes activés par les fils du Destin entre les mains de « Dieu ».
2) Le plan du relatif, du temporel.
Toute manifestation est faite d’opposés; une
qualité existe parce qu’elle a son opposé. S’il faisait toujours une bonne
température, il n’y aurait pas de bonne température…
Le chaud et le froid n’ont pas de définition
absolue et ils existent seulement l’un par rapport à l’autre. Ce sont des
termes comparatifs comme grand et petit, fort et faible, beau et laid, bon ou
mauvais, etc.
Alors, si tout est relatif dan le plan où nous
nous trouvons, il n’est pas nécessaire de suivre une morale!
- Bien au contraire, c’est absolument nécessaire.
Car étant donné que nous nous attribuons le mérite de nos bonnes actions, nous
devons aussi accepter la responsabilité des mauvaises. Si nous revendiquons nos
qualités, nous devons aussi admettre nos défauts. Nous ne pouvons pas faire
tout ce qui nous passe par la tête et suivre tous nos caprices en disant :
« je ne suis responsable de rien » ; au contraire, nous devons
essayer d’agir à la lumière de ce que nous dit « notre » conscience
morale qui est un dérivé de la Conscience-en-Soi.
Dans le plan relatif où nous nous trouvons, et à
partir de notre perspective égocentrée actuelle, nous avons à chaque moment
l’obligation de choisir entre au moins deux options (même si on peut choisir de
ne pas choisir, c’est encore un choix). Nous devons décider par
exemple entre: j’y vais ou je n’y vais pas, je le fais ou je ne le fais
pas, je continue ou j’arrête, je le dis ou non, etc.
D’autre part, même si nous vivons dans un monde où
presque tout est relatif, tous les êtres humains aspirent au Tout, à la
Totalité. Il est vrai que ce qui est beau pour l’un, est laid pour un autre. De
même l’un trouvera bien ce que son voisin trouvera mal. Tout dépend des points
de vue. Cependant en nous tous existent les archétypes qui sont les attributs
de Dieu : la Bonté, la Beauté, l’Amour, le Beau, le Vrai, etc. Si
quelqu’un s’avisait de dire que ce n’est pas ainsi, ne ferait-il pas alors, au
moment même de sa négation, appel à l’archétype de la Vérité ?
Pour résumer : dans la perspective de la
totalité, le petit homme est absolument conditionné ; mais au niveau
relatif où il se croit être, il peut et doit toujours faire un choix et assumer
sa responsabilité et les conséquences de ses actes.
Le comportement altruiste
Pourquoi les religions insistent-elles tellement
sur les bonnes actions et le
comportement altruiste?
- Si un athlète obtient une meilleure condition
physique, ce n’est pas parce qu’une divinité a été touchée par ses efforts et
va le récompenser mais parce que, grâce à son entraînement, ses organes se sont
développés en vertu des lois physiologiques. Si on doit réaliser de bonnes
actions, ce n’est pas pour complaire à Dieu ou obtenir une récompense mais parce que les bonnes actions modifient
le caractère. Le boulanger fait le pain, mais faire le pain fait le boulanger.
La graphologie peut révéler le caractère, mais améliorer son écriture peut le
corriger. Les mauvaises habitudes tendent à se perpétrer mais les bonnes
également. L’enfer est peut-être pavé de bonnes intentions mais le paradis
aussi.
Il a été dit que : « Notre caractère
est fait d'habitudes : qui sème une pensée récolte une action. Qui sème une
action récolte une habitude. Qui sème une habitude récolte un caractère. Qui
sème un caractère, récolte un destin »).
Il faut donc faire attention avec ce que nous
pensons car une pensée peut déterminer toute notre vie. Par exemple, si on se
met dans la tête - ou plus exactement si une pensée nous vient - et qu’elle
commence à tourner dans notre tête acquérant de la sorte une espèce de force de
gravité et d’attraction qui fera boule de neige et attirera ainsi d’autres
pensées et sentiments, elle se chargera ainsi de désirs et d’émotions qui nous
pousseront à agir dans la direction indiquée par la pensée initiale.
Par exemple, le désir d’acquérir une maison
secondaire avec toutes les dépenses que cela comporte telles que :
acquisition du terrain, paiement de la maison, achat de tous les meubles et appareils
en plus de ceux que nous avons déjà dans notre maison habituelle, tout cela va
hypothéquer toute notre vie, tant au propre (paiement de l’hypothèque) qu’au
figuré (nécessité de travailler plus, d’économiser, de se préoccuper, etc.).
En outre, étant donné que le moi limité est
« faux », le fait de se préoccuper d’un autre que soi est déjà une
rectification de l’erreur (ou péché original). Cette « sortie » du moi
illusoire, cet abandon de l’égocentrisme, peut se faire sous la forme de :
l’action (aide, charité, assistance, en un mot, le service désintéressé) ;
la dévotion (adoration de Dieu, ou d’un saint qui, apparemment, ne sont pas
moi) ; l’étude et la réflexion profonde dans laquelle, momentanément, le
moi individuel s’oublie.
Naturellement, tous ces éléments peuvent, et
devraient, se combiner avec en plus, la prière et la méditation et les
restrictions dans la jouissance des biens de ce monde.
Ainsi s’explique la manière de vivre, entre autre,
des soeurs de la charité, des moines, des ascètes, etc., c’est-à-dire des
croyants véritables. Tous ont en commun le fait d’essayer de s’occuper d’autre
chose que du « moi » et de ses
extensions (famille, clan, etc.)
Nous retrouvons ici l’idée du sacrifice et nous
comprenons le pourquoi du jeûne, des restrictions vestimentaires, du
renoncement au luxe, au confort et aux caprices du moi. En effet, si en
fait, ce dernier est illusoire, pourquoi alors continuer à l’alimenter ?
Si on prétend trouver la vérité, faut-il entretenir l’erreur ? Si je veux
aller à l’est, pourquoi continuer à aller vers l’ouest?
Quant au pourquoi du comportement altruiste,
celui-ci se justifie par le fait que, non seulement tout est dans le Tout,
comme c’est logique, mais aussi que le Tout est en tout, c’est-à-dire que
l’authentique nature du Tout, Dieu, se manifeste partout et en tout.
Les bouddhistes disent: « Tout en un et
un en tous », et dans le bouddhisme mahayana, l’univers est comparé à
« un vaste filet de perles (placées sur les noeuds) dans le sein duquel le
reflet de l’une des perles est contenu dans tous les autres, et les reflets de
toutes sont contenus en chacune d’elles.»
Par conséquent, aimer et aider les autres revient
finalement à s’aimer et s’aider soi-même.
Nous illustrerons la justification du comportement
altruiste avec ce à quoi le symbolisme de la croix nous a fait penser. Sachant
par ailleurs que la croix a de très nombreuses possibilités d’interprétation.
La croix pourrait représenter une
expansion tous azimuts à partir du centre et pourrait symboliser ainsi la
totalité.
La branche verticale pourrait représenter une
expansion verticale, l’axe qui relie, d’un côté le divin et les mondes
supérieurs, et de l’autre, les profondeurs de l’être. Symbole à la fois d’une
élévation vers le haut dans l’ascension spirituelle et d’une descente vers le
bas jusqu’aux tréfonds de l’être. En langage plus psychologique, on dirait que
c’est une aspiration de la lumière de la conscience pour éclairer les
motivations obscures des profondeurs inconscientes. On pourrait dire que cette
branche verticale correspond à l’une des deux injonctions fondamentales du
Christ: « Tu aimeras le seigneur ton Dieu par-dessus tout ».
Quant à l’autre branche elle pourrait illustrer
une expansion horizontale avec ses deux branches comme des bras ouverts :
c’est l’accueil et l’amour pour le monde et pour les autres. On pourrait la
faire correspondre à la deuxième injonction : « Tu aimeras ton
prochain comme toi-même ».
Mais citons plutôt ce que Ramana Maharshi dit à
propos de la Crucifixion :
« Le corps physique est la Croix. Jésus, le
fils de l’homme, est l’ego ou l’idée “Je suis le corps”. La crucifixion de
l’ego entraîne sa résurrection sous forme du Soi glorieux - le Christ - le fils
de Dieu. Rappelez-vous l’enseignement du Christ. “Celui qui perdra sa vie à
cause de moi, la sauvera” (Luc 9 :24)».
Une autre traduction dit :
« Quand on crucifie sur la croix le fils de
l’homme, l’ego s’éteint et ce qui survit, c’est l’Être Absolu. C’est la
résurrection du Soi Glorieux, du Christ…le Fils de Dieu.
Objections
Mais il n’y a rien de scientifique dans la
spiritualité et en réalité ce ne sont que des idées.
- Après avoir dit que la spiritualité, ce n’est rien
d’autre que la recherche de la Félicité par la Vérité résidant derrière les
apparences, de cette vérité qui nous rendra libres (« Vous connaîtrez
la vérité, et la vérité vous rendra libres, Jean 8 : 32», nous
répondrons trois choses :
La première est qu’en réalité tout le monde a sa
propre philosophie, même si c’est sans en avoir toujours conscience. Nous
ferons remarquer au passage que les théories matérialistes sont aussi des idées
et que par conséquent, elles ne sont pas pure matière.
La seconde, c’est que c’est vrai : tout ce
qui a été exposé, ce ne sont que des idées. Mais cette affirmation aussi est
une idée. La différence, c’est qu’il y a des idées qui, potentiellement, sont
plus à même que d’autres de nous rapprocher de la vérité. Ou bien on pourrait
dire également que l’idée de Réveil et de spiritualité est une aide par
laquelle on va d’illusions grossières à d’autres plus légères jusqu’à pouvoir
« perforer le mur » de la séparation. (Il serait préférable de dire:
jusqu’à nous rendre compte qu’il n’ y a jamais eu ni paroi, ni séparation).
La troisième, c’est que si on veut faire des recherches
sur les kangourous, il faudra expérimenter avec eux en Australie et non avec
les éléphants d’Afrique. De la même manière, les “expériences spirituelles”
doivent avoir soi-même comme champ d’application. Elles ne pourront pas être
réalisées de l’extérieur. Pour beau qu’on veuille démontrer de l’extérieur que
je suis heureux, la “preuve” de mon bonheur sera en moi-même.
L’océan ne serait pas affecté par ce que les
vagues opineraient sur lui. De manière similaire, Dieu n’est pas affecté par ce
qu’on peut penser de Lui.
L’utilité des Enseignements
Si la vérité de la Conscience est finalement si
simple, les enseignements spirituels ne sont-ils pas inutiles ?
- Nous répondrons en considérant quatre
aspects de la question:
·
Premier aspect :
En effet, la conscience est partout, et donc en
nous. Le problème, c’est que nous ne nous en rendons pas compte, parce que le
miroir de l’intellect est embué par le feu des passions qui provoquent le
bouillonnement des pensées et des sentiments. (On notera au passage que le
terme passion vient du grec pathos, signifiant souffrance, supplice,
état de celui qui subit, passivité).
Les obstacles à la prise de conscience de notre
conscience sont donc finalement moins d’ordre intellectuel qu’affectif et
passionnel, victimes que nous sommes de nos habitudes, conditionnements,
réflexes automatiques, projections, etc. Par conséquent, nous devons nous
efforcer pour sortir de la routine des routes habituelles. Sortir du sillon,
creusé par l’habitude, dans lequel nous retombons sans cesse.
Nous devons cesser de regarder la carte de la
connaissance théorique pour nous concentrer sur le chemin du pèlerinage qui
conduit au Finisterre, là où la terre finit et où commence le vrai voyage
spirituel, c’est-à-dire l’ascension vers les mondes plus élevés.
Le pèlerin est, selon son étymologie, un étranger.
C’est celui qui se sent étranger à ce monde et qui se met en route pour trouver
par sa quête le Graal de sa véritable nature.
Le Graal, c’est aussi le vase, ou la coupe, qui
évoque le cœur, qui est tout à la fois le pourvoyeur de sang et d’énergie, le
lieu le plus intérieur (le noyau), le saint des saints au sein de l’homme, le
siège de l’Amour et de la Conscience du Soi en soi.
·
Deuxième aspect :
Bien que l’essence des Enseignements soit très
simple en effet, il faut qu’on nous répète leurs vérités maintes et maintes
fois jusqu’à ce qu’elles finissent par pénétrer en nous et faire disparaître
progressivement les voiles de l’ignorance, des résistances et des habitudes. En
outre il est souvent nécessaire, pour préciser notre compréhension, qu’on nous
explique les choses à partir de différents angles d’approche.
Pour décrypter, compléter ou préciser le sens d’un
document religieux, on doit parfois avoir recours à un texte provenant d’une
autre source. Par exemple, pour étudier un texte en araméen on peut se référer
à un texte grec. De la même manière, la connaissance des enseignements d’une
autre religion peut nous aider à mieux comprendre les textes de notre propre
tradition. C’est ainsi que certains « chrétiens de naissance » qui
s’étaient détournés de leur religion ont pu comprendre le véritable sens de
l’enseignement de Jésus à travers les enseignements du bouddhisme, par exemple.
D’autre part, à l’époque de la mondialisation,
cette intercommunication n’est-elle pas souhaitable, voire indispensable ?
Les idées profondes ne peuvent-elles donc pas
circuler autant que les produits qui nous viennent de l’autre bout du
monde ?
·
Troisième aspect :
Les enseignements spirituels peuvent être comparés
à des graines semées sur un terrain. Elles peuvent rester longtemps à la
superficie jusqu’à ce qu’un (beau) jour un éclair d’intuition, tel un arbre à
l’envers, ne viennent zébrer la nuit de l’ignorance et allumer le feu sacré de
la recherche et ouvrir une brèche dans la carapace du moi, où peut alors
s’introduire la semence qui verra l’épanouissement de l’arbre de vie.
·
Quatrième aspect :
On pourrait comparer les enseignements à des
échafaudages. Ils sont utiles durant la construction d’un édifice en servant de
support pour travailler. Quand l’oeuvre est achevée, ils deviennent inutiles ; on peut alors
-et même on doit- les enlever. Mais pour construire un pont, par exemple, on ne
peut retirer l’arche de bois provisoire qu’après avoir posé la dernière pierre de la clef de voûte de l’ouvrage.
Une autre comparaison est celle d’une épine qu’on
utilise pour en extraire une autre. Quand l’épine de l’ignorance a été enlevée,
on jette aussi celle des enseignements.
On pourrait également demander si une voiture est
utile pour traverser l’océan. Quand on habite dans un port, elle ne l’est pas.
Si en revanche on habite à l’intérieur des terres, elle l’est pour aller
prendre le bateau. Ainsi donc, les enseignements peuvent nous être utiles pour
nous rapprocher du lieu et du moment où nous devrons les abandonner pour nous
servir d’un autre véhicule, comme la réflexion et la méditation.
A un certain stade cependant, les moyens qui nous
ont servi à franchir les écueils peuvent en arriver à être eux-mêmes
l’obstacle. Nous devons alors abandonner le véhicule qui nous a conduit au
port, laisser la barque qui nous a permis de traverser la rivière, ou jeter la
perche qui nous a permis de passer le gué.
Mais c’est plus facile à dire qu’à faire. En
effet, il se produit souvent un curieux phénomène : tout occupés que nous
sommes à lire ou à élaborer des plans d’évasion, nous ne voyons pas que la
porte de notre prison est déjà ouverte…, que l’idée d’être le chercheur est ce
qui empêche de trouver, que le « je » personnel n’est qu’une idée
cannibale qui se nourrit d’autres idées, et que le Témoin du chercheur ne
cherche pas : il voit.
L’idée d’une personne qui observe
est comme un bandeau sur le véritable observateur. C’est comme une étiquette
placée devant nos yeux, qui brouille notre vue et, tel un voile, nous sépare
d’un contact direct avec le monde et les êtres. Ou c’est comme voir à travers
une vitre dans laquelle le reflet de notre propre visage trouble notre vision.
Expliquons-nous :
Je crois que c’est moi, Monsieur X ou Madame
Y, qui voit en tant que sujet. Mais en
réalité, le sujet ne peut s’appréhender lui-même en tant qu’objet, parce que
l’objet ne peut capter le sujet. Or ce « je » qui croit être un corps
et un mental avec sa personnalité, n’est qu’un objet parmi d’autres. Car tout
comme l’œil ne peut se voir lui-même directement, le sujet ne peut être vu
comme objet. En effet, si le sujet était vu comme un objet, il serait donc un
objet et non le sujet.
On pourrait dire que je suis cela qui voit
que le sujet ne peut être vu. Mais cela ne peut justement pas être
objectivé, parce que sinon cela serait précisément un objet et il faudrait donc qu’il existe un autre
sujet qui voit l’objet. Nous pourrions ainsi régresser indéfiniment mais le
dernier observateur, ou le dernier sujet, ne peut être observé. Car s’il
l’était, il ne serait pas l’ultime observateur.
C’est pourquoi, de la même manière que je ne peux
ni m’attraper, ni me soulever moi-même, le « Je véritable» ne saurait être appréhendé.
Le véritable sage
Qu’est-ce donc qu’un véritable sage ?
- Après avoir rappelé que l’étymologie de sage
est celui qui sait (d’où sage-femme), on pourrait dire, par goût du
paradoxe, que le véritable sage, c’est-à-dire l’homme totalement réalisé, ou
Homme universel, est d’un égocentrisme
absolu. Tel un trou noir, il absorbe tout en lui. Cela pourrait paraître d’un
égoïsme monstrueux. Mais en fait, c’est tout le contraire, car si tout est lui,
peut-il se sentir supérieur à quelqu’un ? De qui peut-il être jaloux, de
quoi peut-il être envieux? Peut-il craindre quelque chose, quelqu’un, l’avenir
ou même la mort ? Et pour lui, aimer et aider les autres, c’est s’aimer et
s’aider soi-même.
Le sage parle peu car : « Celui qui
sait ne parle pas, celui qui parle ne sait pas ».
Au moment même de parler du silence, celui-ci s’en
va. Il en est de même de la Vérité, de la Réalité ou de Dieu. Et tout comme
aucun récipient ne peut contenir le dissolvant universel, aucun concept ne peut
“contenir” Dieu, ou la Vérité, ou la Réalité.
Par ailleurs, seul le Vide peut contenir le Tout.
Conclusion
Tout ce qui a été exprimé n’est qu’une ébauche et
mériterait d’être développé bien davantage. Il conviendrait de parler d’un
autre sujet fondamental auquel ni les philosophes, ni personne en général ne
semble s’intéresser : celui du fond commun aux trois états de la vie humaine, c’est-à-dire
l’état de veille, celui de sommeil avec rêves et celui du sommeil profond. Ils
revêtent une importance capitale pour aborder la condition humaine, mais il
semble que bien peu, en Occident, y fassent attention. Peut-être parce que nous
sommes tellement habitués à ces états, ils nous paraissent si naturels, que
nous ne nous intéressons pas à leur sujet. Mais nous ne pouvons pas nous
occuper d’eux dans cette petite étude, car cela nous entraînerait trop loin.
Nous pouvons cependant soulever aussi au passage la question de l’état de
conscience de notre petite enfance. Cet état n’était-il pas différent de notre
état de conscience actuel ? Est-il plus « faux » ? Ou
peut-être plus vrai ?
Communément, on croit que la conscience est en
nous. Mais ne serait-ce pas le contraire ? C’est-à-dire, ne serait-ce pas
plutôt nous qui sommes « dans » la conscience ? En effet,
peut-il exister quelque chose hors de la Conscience ? Et pouvons-nous percevoir
quoi que ce soit sans conscience ?
Ce qui est curieux, c’est qu’on ne se rend pas
compte qu’on se rend compte. Rendez-vous
compte !
Par ailleurs, une phrase qui m’a beaucoup frappé
est la suivante:
« Le Témoin du monde et du temps
transcende le temps et le monde ».
Il est fort possible que quelqu’un pense que ce
qui a été traité relève de ces choses théoriques qu’on ne peut pas mettre en
pratique parce qu’elles ne “fonctionnent” pas en réalité. Pour répondre à cet
objection, nous pouvons faire une comparaison avec l’apprentissage du ski: une
connaissance théorique de l’art du ski ne contredit pas sa pratique, bien au
contraire. La métaphore se renforce aussi du fait que la connaissance
théorique du ski, quelle que soient sa qualité et son amplitude, n’équivaut pas
à savoir skier. La pratique est indispensable. Mais si quelqu’un voit une
personne qui skie mal, cela ne signifie pas que cette personne ne puisse par
ailleurs avoir de bonnes connaissances théoriques de ce sport, et qu’elles ne puisse
les transmettre à une personne désireuse d’apprendre à skier, qui en obtiendra
ainsi un bénéfice pour commencer sa pratique.
De manière similaire, un perroquet qui écouterait
les enseignements d’un maître spirituel, et même s’il était capable de les répéter,
ne pourrait en profiter. Mais une personne qui écouterait le perroquet
pourrait, elle, en obtenir un bénéfice. Alors faites-les vous répéter!
Je dois ajouter qu’on peut écrire des
encyclopédies sur le sommeil et le réveil et demeurer pourtant endormi…et que
si savoir que fumer est mauvais pour la santé est une chose, arrêter de fumer
en est une autre.
Par ailleurs, si vous voyez quelqu’un qui,
quoiqu’il vous dise que le tabac est mauvais pour la santé, est en train de
fumer, ça ne diminue en rien la nocivité du tabac…
S’il est vrai qu’il y a beaucoup d’appelés et peu
d’élus, cela ne devrait pas être un prétexte pour ne pas s’efforcer pour passer
de la métaphysique expliquée à la métaphysique appliquée.
Car
rien ni personne ne peut nier CELA qui, comme le silence, est avant, au-dessous
et après les paroles et qui, tel l’espace, contient tout, et se trouve à la
fois à l’intérieur de tout comme les alvéoles d’une éponge qui baigne dans la
mer sont elles-mêmes imprégnées d’eau.
Face à
CELA, toute négation disparaît comme un flocon de neige qui tombe dans le feu
ou comme les ténèbres qui disparaissent avec l’apparition de la lumière.
Comme conclusion d’un sujet qui ne peut en avoir
aucune – si ce n’est peut-être le Silence – nous pouvons seulement désirer que
la graine du doute commence à germer dans l’esprit des sceptiques et que
ceux-ci commencent à douter de leurs doutes…
Nous terminerons avec ce qui est L’Alpha et
l’Omega, le commencement et la fin, la base et le sommet, le principe et la
finalité de tout, l’origine et le but de toutes les religions et traditions
spirituelles, qui est CE QUI EST, et dont la « découverte est la finalité
de la vie humaine » :
DIEU (extraits de l’oeuvre intitulée : Sentier
divin de Sivananda)
“Dieu est l’unique réalité. Dieu
est ton créateur, sauveur et rédempteur. Il imprègne tout. Il habite en ton
propre cœur. Il est toujours près de toi. Il se trouve même plus près de toi
que ta jugulaire ou ton nez. Il t’aime. Il peut te parler. Tu ne peux découvrir
Dieu par l’intellect. Mais tu peux cependant le trouver par moyen du sentiment,
de la méditation, de l’expérience et de la réalisation.
Qui est Dieu?
La
lampe à gaz ne parle pas; pourtant elle brille et illumine tout à son alentour.
Le jasmin ne peut pas parler mais il exhale son parfum dans toutes les
directions. Le phare ne frappe aucun tambour, mais il envoie sa lumière amicale
au marin. L’Invisible ne fait sonner aucun gong ; pourtant Son
omniprésence est ressentie par le sage dépassionné et discriminateur.
Derrière tous les noms et toutes
les formes, il existe une Essence sans nom ni forme. Derrière tous les
Gouverneurs se trouve le Gouverneur suprême. Derrière toutes les lumières
brille l’unique Lumière de lumières. Derrière tous les sons réside le silence
suprême et insonore. Derrière tous les maîtres se trouve l’unique Suprême
Gourou.
Derrière toutes ces choses périssables existe
l’absolu impérissable. Derrière tous les mouvements se trouve l’Infini
impassible. Derrière le temps, les minutes et les jours, s’étend l’Éternité
unique, au-delà du temps. Derrière la haine, la débauche et les guerres repose
l’Amour unique et caché.
Lui se trouve libre de tout mal et
de toute limitation. Il est tout-puissant, omniscient et omniprésent. Il n’a ni
commencement, ni continuation, ni fin. Il habite à l’intérieur de tous les
êtres. Il contrôle tout de l’intérieur.
Dieu est tout en tout. Dieu est la
seule réalité dans cet univers. Les choses existent par la lumière de Dieu.
Dieu existe toujours. Tout dépend
de Lui, mais Lui ne dépend de rien. Il est la Vérité.
Dieu est l’objectif et la finalité
de toute Sádhana yoguique (sādhana signifie littéralement “moyens
pour obtenir quelque chose” ou plus spécifiquement : “la pratique
spirituelle”). Quant au mot yoga sa signification est union
et c’est donc la discipline qui mène à l’union avec la Transcendance.
Dieu est le centre vers lequel
toutes les choses tendent. C’est le but ou le bien le plus élevé du monde.
Quand quelqu’un est affamé, il existe un aliment pour satisfaire cette faim.
Quand quelqu’un est assoiffé, il y a de l’eau pour épancher sa soif. De la même
façon, étant donné qu’il existe le besoin de se sentir toujours heureux, il
doit y avoir quelque chose pour satisfaire cette impulsion. Ce quelque chose,
c’est Dieu, la manifestation de la félicité. Dieu, l’Immortalité, la Liberté,
la Perfection, la Paix, le Bonheur, l’Amour, son tous des termes
synonymes.
Dieu, qu’est-ce que c’est ?
Le suprême est indéfinissable, bien
que tous les érudits donnent des explications intellectuelles de
« Cela » absolument inexactes.
Chaque homme a son propre concept
de Dieu. Le Dieu du militaire porte un casque. Le Dieu de l’hindou porte des
marques sur Son front, un rosaire et une guirlande de fleurs. Le Dieu du
chrétien porte une croix. Pour certains, Dieu a des ailes. Le buffle pense que
Dieu est un buffle très grand.
De tels concepts anthropomorphiques
sont, évidemment, puérils. Le plus important dans la vie est d’obtenir un
concept adéquat de Dieu, parce que ta croyance en Dieu gouverne ta vie entière.
Dieu existe-t-il?
Dieu se trouve au-delà de
l’imagination humaine; cependant, c’est une vérité vivante. Brahmán n’est pas
une abstraction métaphysique. C’est l’être le plus réel et complet qu’il
existe.
L’existence de Dieu ne peut pas
être prouvée par l’expérimentation scientifique. L’Absolu déconcerte même le
mental du plus grand érudit. Il échappe même à l’intellect le plus puissant. Il
est expérimenté comme pure conscience là où cesse l’intellect, où l’érudition
finit et où l’être lui-même se perd entièrement. Tout se perd et tout se
trouve.
Tu as besoin de preuves de
laboratoire ? Très intelligent! Tu veux limiter le Dieu illimitable, qui
imprègne tout, dans tes éprouvettes, chalumeaux et substances chimiques. Mais
Dieu est la source de toutes tes substances chimiques. C’est Lui le substrat de
tes atomes, électrons et molécules. Sans Lui, aucun atome, aucun électron ne
peut se mouvoir. C’est Lui le gouverneur interne.
C’est Dieu qui confère leur pouvoir
à nos sens, la perception à notre mental, le discernement à notre intellect et
la force à nos membres. Mais l’homme s’imagine orgueilleusement que c’est lui
l’acteur et l’expérimentateur. C’est grâce à Sa volonté que nous vivons et
mourons. L’homme n’est rien face au Pouvoir régulateur et tout-puissant qui
dirige les mouvements de l’Univers.
La volonté de Dieu s’exprime
partout comme loi. Les lois de la gravité, de la connexion, de la relativité,
de cause et effet, les loi de l’électricité, de la chimie, de la physique et
toutes les loi psychiques sont l’expression de la volonté de Dieu.
De la même manière que nous expliquons tout
dans la nature au moyen de la loi de cause à d’effet, la nature comme un tout
requiert aussi une explication. Elle doit avoir sa propre cause, qui
doit être distincte de son effet. Cette cause doit être une entité
sur-naturelle, c’est-à-dire, Dieu.
La nature ne
consiste pas en une simple collection fortuite d’événements, ni en un simple
ensemble d’accidents, mais c’est quelque chose qui a un ordre. Les planètes
tournent de manière ordonnée dans leur orbite; les graines poussent
régulièrement en se convertissant en arbres ; les saisons se succèdent les
unes aux autres dans un ordre. Cependant, la nature est insensible ou Yada.
Elle ne peut s’auto-ordonner. Elle requiert donc l’existence d’un être
intelligent, Dieu, qui est responsable d’elle. Même Einstein, le fameux
scientifique, était profondément convaincu que l’Univers fut créé par une
Intelligence Suprême.
Bien que tu ne puisses voir les
étoiles durant le jour, elles existent malgré tout. Bien que tu ne puisses pas
voir le soleil un jour nuageux, il existe pourtant. De la même manière, bien
que tu ne puisses voir Dieu avec tes yeux physiques, il existe cependant. Si tu
développes la vue divine, ou l’oeil de l’intuition au moyen de la pratique de
la méditation, tu pourras alors Le contempler.
Dieu est la preuve de Lui-même. Il
ne requiert aucune preuve, car Lui-même est la base de l’acte ou du processus
de démonstration.
Où est Dieu?
Où est Dieu? Il n’existe aucun lieu
où il ne soit pas. Tout comme un fil unique pénètre toutes les fleurs qui composent
une guirlande, un Être unique imprègne tous les êtres vivants. Il est
occulté dans tous les êtres et toutes les formes, comme l’huile dans la graine,
le beurre dans le lait, le mental dans le cerveau, le Prana, ou énergie,
dans le corps, le fétus dans le placenta, le soleil derrière les nuages, le feu
dans le bois, la vapeur dans l’atmosphère, le sel dans l’eau, le parfum dans
les fleurs, le son dans le disque, l’or dans le quartz, les microbes dans le
sang, etc.
Dieu demeure dans tous les êtres
comme vie et conscience. Il est le rugissement du lion, le chant de l’oiseau et
les pleurs du nouveau-né. Sens Sa présence en tous lieux.
Contemple Dieu dans les ailes du
papillon, dans la toux du malade, dans le murmure du ruisseau, dans le son de
la cloche. Contemple la merveille de la face du Seigneur dans chaque objet de
ce monde.
Chaque souffle qui flue dans le
nez, chaque battement que le coeur fait, chaque artère qui pulse dans le corps,
chaque pensée qui surgit dans le mental, te disent que Dieu est proche.
Chaque fleur qui distille son
parfum, chaque fruit qui t’attire, chaque brise légère qui souffle, chaque
ruisseau qui coule docilement parle de Dieu et de Sa miséricorde.
Le vaste océan avec ses vagues
puissantes, les immenses Himalayas avec leurs glaciers, le soleil et les
étoiles brillantes dans le ciel ouvert, l’arbre aux branches majestueuses, les
sources fraîches dans les collines et les vallées te parlent au sujet de Sa
toute-puissance. La douce musique des chanteurs, les conférences des orateurs
énergiques,les poèmes des poètes célèbres, les inventions des habiles
scientifiques, les opérations des dextres chirurgiens, les sentences sacrées
des saints, les pensées de la Bhagavad Gita, les révélations des
Upanishads parlent de Dieu et de Sa sagesse.
Tout est Dieu. Le bien est Dieu. Le
malheur est Dieu. Reconnais-le en tout et repose pacifiquement dans la
félicité.
Dieu imprègne l’univers entier. Il
marche déguisé en mendiant. Il se lamente, meurtri, déguisé en malade. Il erre
dans les bois vêtu de guenilles. Ouvre tes yeux. Contemple-le en tout. Sers
tout le monde. Aime chacun.
Sens partout la Présence Divine; en
chaque forme, chaque pensée, chaque sentiment, et en chaque affection, en
chaque mouvement et en chaque émotion.
Dieu vu au travers des sens, c’est
la matière. Vu au travers de l’intellect, c’est le mental. Et vu au travers de
l’esprit, c’est l’Atman, ou l’Être.
Le Seigneur habite en ton
intérieur. C’est Lui qui est le gouverneur interne, ou Antariamin, qui
garde et contrôle ta vie. Il est en toi et tu es en Lui. Il ne se trouve pas
loin de toi, mais il est plus proche de toi que toi-même. Ce corps est en
réalité son temple mobile, dont le sanctum sanctuorum est ton cœur. Ferme tes
yeux. Retire tes sens, ou Indriyas, des objets sensoriels. Cherche-le
dans ton propre cœur avec un mental ferme, avec dévotion et un amour pur. Alors
tu le trouveras, sans aucun doute. Il t’attend là avec les bras ouverts pour
t’étreindre. Si tu ne peux le trouver là, tu ne pourras le trouver nulle part
ailleurs ».
(Fin de la citation)
Toutes les photographies sont de Eric Jean Mallet, que nous remercions chaleureusement pour nous avoir autorisés à les utiliser.